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effets, plans et magasins, avec inventaires exacts, appartenant à Sa Majesté Catholique, lesquels sont par ces présentes transférés à Sa Majesté Britannique en même titre de possession qu'ils ont appartenu jusqu'ici à Sadite Majesté Catholique.

2o Les troupes de Sa Majesté Catholique, sortiront avec les honneurs de la guerre et déposeront leurs armes à la distance de trois cents pas des forts qu'elles occupent, ce 18 février, à cinq heures de l'aprèsmidi.

3o A tous les officiers et troupes susdits de Sa Majesté Catholique il est permis de garder leurs effets particuliers, et aux officiers il est permis de porter leur épée.

4o L'amiral Don Sebastian Ruiz de Apodaca, se trouvant à terre dans l'ile après avoir brûlé et abandonné ses vaisseaux, lui et les officiers, et les hommes appartenant à l'escadre qu'il commandait, seront compris dans la présente capitulation, aux mêmes termes concédés aux troupes de Sa Majesté Catholique.

5o Aussitôt que des navires pourront être convenablement obtenus pour ce service, les prisonniers seront transportés en Espagne, où ils demeureront prisonniers de guerre jusqu'à ce qu'ils soient échangés par cartel entre les deux nations, ou jusqu'à la paix, sous la condition bien expresse qu'ils ne serviront pas contre la Grande-Bretagne ou ses alliés jusqu'à ce qu'ils aient été échangés.

6o Comme parmi les troupes de Sa Majesté Catholique il y a des officiers dont les affaires particulières réclament leur présence sur différents points du conti

nent américain, il est accordé à ces officiers six mois, plus ou moins, pour se rendre sur parole à cesdits points, et, cette période écoulée, ils auront à s'en retourner en Europe; mais le nombre de ceux qui jouiront de cette indulgence devant être limité, Son Excellence Don Chacon devra préalablement délivrer aux commandants britanniques une liste indiquant leurs noms, leurs rangs et les points où ils se rendent.

70 Les officiers de l'administration royale, à la livraison des magasins dont ils ont charge à ceux de ces officiers que les commandants britanniques peuvent nommer à leur place, recevront comme il est d'usage en pareil cas, des récepissés des officiers ainsi nommés pour recevoir les magasins.

80 Toute propriété particulière des habitants espagnols, aussi bien que celle de ceux qui peuvent avoir été naturalisés, leur est garantie.

90 Toutes les archives publiques seront conservées dans ceux de ces bureaux ou offices où elles se trouvent en ce moment (1); et tous les contrats et marchés conclus selon les lois espagnoles seront tenus pour obligatoires et valides par le gouvernement britannique.

10° Les fonctionnaires d'admininistration espagnols possédant des biens-fonds à la Trinidad ont la permission de rester dans l'ile en prêtant serment d'allégeance

(1) Elles sont toutes, ou presque toutes, devenues la proie des vers; depuis le gouvernement de Sir Ralph Woodford, aucune administration n'a voulu s'en occuper.

à Sa Majesté Britannique, et ils ont aussi la faculté, s'il leur plaît, de vendre ou aliéner ces biens et de s'en aller ailleurs.

11o Le libre exercice de leur religion est accordé aux habitants.

12o Les gens de couleur libres, reconnus tels par les lois espagnoles, seront protégés dans leur liberté, leurs personnes et leurs biens, comme les autres habitants, en prêtant serment d'allégeance, et en se comportant comme il convient à de bons et paisibles sujets de Sa Majesté Britannique.

13o Les matelots et soldats de Sa Majesté Catholique seront nourris, à partir du moment où ils auront mis bas les armes, par le gouvernement britannique, le règlement des frais devant se faire dans le cartel entre les deux nations.

14o Les malades des troupes espagnoles seront soignés, mais sous la garde et la surveillance de leurs propres chirurgiens.

15° Tous les habitants de la Trinidad, dans les trente jours de cette date, prêteront serment d'allégeance à Sa Majesté Britannique, se conduiront paisiblement et seront fidèles à son gouvernement, sous peine, en cas de désobéissance, d'être expulsés de l'ile (1).

En dehors des articles de guerre, cette capitulation, on le voit, ne garantit aux habitants que la validité des contrats et engagements conclus sous les lois espagnoles, et le libre exercice de leur religion; nulle men

(1) Traduit de l'anglais. Voir l'original à l'Appendice.

tion n'y est faite du maintien de ces lois espagnoles, ni même de celui de la cédule de colonisation et du code noir. Telle quelle, cependant, elle fut acceptée sinon avec satisfaction, du moins sans répugnance, par la population, qui ne diminua du fait de la conquète anglaise que d'un millier d'habitants à peine (1). A cette époque, l'Angleterre possédait toutes les petites Antilles, sauf la Guadeloupe; la paix paraissait avec raison de plus en plus éloignée en Europe, et les habitants, attachés à leur nouvelle patrie et ne sachant où transporter leurs familles avec avantage, prirent le sage parti d'essayer une autre fois de s'habituer à vivre sous la domination anglaise. Quant aux irréconciliables, ils allèrent en grande partie s'établir à Güiria, sur le promontoire de Paria (2). Conformément à l'article 1 de la capitulation, le 18 février, à cinq heures de l'après-midi, deux mille deux cents hommes mirent bas les armes inutiles qu'ils portaient; le lendemain 19, les employés militaires livrèrent à leur tour aux vainqueurs une centaine de pièces de canon, et une grande abondance de munitions de guerre et de provisions (3). Peu de jours après, l'ex-gouverneur Chacon et l'amiral Apodaca s'embarquèrent pour l'Espagne. De son côté, le général Abercromby, après avoir pris les mesures administratives nécessaires au gouvernement de l'île, la quitta aussi pour entreprendre la conquête

(1) Chiffre de la population en 1797, 18,627 habitants, idem en 1798, 17,718; différence en moins, 909.

(2) Tradition de famille.

(3) Bryan Edwards, History of the war in the W. I., t. IV, chap. VII, p. 83.

de celle de Porto-Rico, entreprise dans laquelle il échoua complètement (1).

La perte de la belle et florissante colonie de l'Espagne eut un grand retentissement dans le monde; quand les circonstances en furent connues, l'indignation fut générale. Chacun opposait la noble résistance du gouverneur de Porto-Rico à la conduite honteuse de Chacon et d'Apodaca. Aux conférences qui se tinrent à Lille, en France, en cette même année 1797, le Directoire mit pour condition sine qua non de la paix que lui offrait l'Angleterre, le retour de la Trinidad à l'Espagne (2). Aussi Chacon et Apodaca, à leur débarquement à Cadix, furent-ils mis aux arrêts, en attendant leur jugement. Mais ce déploiement de vigueur, commandé par l'opinion publique, ne pouvait être qu'une moquerie sous un gouvernement aussi corrompu que l'était celui de Godoy, le ministre de Charles IV. Pour donner aux esprits le temps de s'apaiser, l'affaire fut traînée en longueur, et ce ne fut que le 28 mai 1798, plus de quinze mois après la prise de l'île, que les deux officiers généraux comparurent à Cadix devant un conseil de guerre. La défense d'Apodaca fut présentée par son frère; elle roula sur l'avis unanime de ses cinq capitaines, ce qui ne le disculpe pas; sur la force supérieure de l'escadre anglaise qu'il exagère; sur la maladie de ses hommes qu'il exagère aussi, et enfin sur l'impossibilité de sa fuite par la bouche du Ser

(1) Fr. Iñigo Abbad y Lasierra. Historia de San-Juan de P.-R. Note, p. 187 et seq.

(2) Thiers, Histoire de la Révolution française, t. IV, chap. x, p. 56 et seq.

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