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ce mouvement de notre ame qui veut savoir une chose et qui demande d'en être instruite. C'est pourquoi nous voyons que l'on se sert de diverses choses pour marquer ce mouvement. Quelquefois cela ne se connoît qué par l'inflexion de la voix, dont l'écriture avertit par une petite marque qu'on appelle la marque de l'interrogation, et que l'on figure ainsi (?).

En françois nous signifions la même chose en mettant les pronoms, je, vous, il, ce, après les personnes des verbes; au lieu que dans les façons de parler ordinaires, ils sont avant. Car si je dis, j'aime, vous aimez, il aime, c'est, cela signifie l'affirmation; mais si je dis, aimé-je? aimez-vous? aime-t-il? estce? cela signifie l'interrogation : d'où il s'ensuit, pour le marquer en passant, qu'il faut dire, sens-je? lisje? et non pas, senté-je? lisé-je? parce qu'il faut toujours prendre la personne que vous voulez employer, qui est ici la première, je sens, je lis, et transporter son pronom pour en faire un interrogant.

Et il faut prendre garde que lorsque la première personne du verbe finit par un e féminin, comme j'aime, je pense, alors cet e féminin se change en masculin dans l'interrogation, à cause de je qui le suit, et dont l'e est encore féminin, parce que notre Jangue n'admet jamais deux e féminins de suite à la fin des mots. Ainsi il faut dire aimé-je, pensé-je, manqué-je? et au contraire il faut dire aimés - tu, pense-t-il, manque-t-il? et semblables.

Des Interjections.

LES interjections sont des mots qui ne signifient aussi rien hors de nous; mais ce sont seulement des voix plus naturelles qu'artificielles, qui marquent les mouvemens de notre ame, comme, ah! ó! heu! hélas ! etc.

CHAPITRE X XI V.

De la Syntaxe, ou Construction des Mots ensemble.

Il reste à dire un mot de la syntaxe, ou construction des mots ensemble, dont il ne sera pas difficile de donner des notions générales, suivant les principes que nous avons établis.

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La construction des mots se distingue généralement en celle de convenance, quand les mots doivent convenir ensemble, et en celle de régime, quand l'un des deux cause une variation dans l'autre.

La première, pour la plus grande partie, est la même dans toutes les langues, parce que c'est une suite naturelle de ce qui est en usage presque partout pour mieux distinguer le discours.

Ainsi la distinction des deux nombres, singulier et plurier, a obligé d'accorder le substantif avec l'adjectif en nombre, c'est-à-dire, de mettre l'un au singulier ou au plurier, quand l'autre y est; car le substantif étant le sujet qui est marqué confusément, quoique directement, par l'adjectif, si le mot substantif marque plusieurs, il y a plusieurs sujets de la forme marquée par l'adjectif, et par conséquent il doit être au plurier; homines docti, hommes doctes.

La distinction du féminin et du masculin a obligé de même de mettre en même genre le substantif et l'adjectif, ou l'un et l'autre quelquefois au neutre, dans les langues qui en ont; car ce n'est que pour cela qu'on a inventé les genres.

Les verbes, de même, doivent avoir la convenance des nombres et des personnes avec les noms et les pronoms.

Que s'il se rencontre quelque chose de contraire en apparence à ces règles, c'est par figure, c'est-à-dire, en sous-entendant quelque mot, ou en considérant les pensées plutôt que les mots même, comme nous le dirons ci-après.

La syntaxe de régime, au contraire, est presqué toute arbitraire, et par cette raison se trouve trèsdifférente dans toutes les langues: car les unes font les régimes par les cas; les autres, au lieu de cas, ne se servent que de petites particules qui en tiennent lieu, et qui ne marquent même que peu de ces cas,

comme en françois et en espagnol on n'a que de et à qui marquent le génitif et le datif; les Italiens y ajoutent da pour l'ablatif. Les autres cas n'ont point de particules, mais le simple article, qui même n'y est pas toujours.

On peut voir sur ce sujet ce que nous avons dit ci-dessus des prépositions et des cas.

Mais il est bon de remarquer quelques maximes générales, qui sont de grand usage dans toutes les langues.

La première, qu'il n'y a jamais de nominatif qui n'ait rapport à quelque verbe exprimé ou sous-entendu, parce que l'on ne parle pas seulement pour marquer ce que l'on conçoit, mais pour exprimer ce que l'on pense de ce que l'on conçoit, ce qui se marque par le verbe.

La deuxième, qu'il n'y a point aussi de verbe qui n'ait son nominatif exprimé ou sous-entendu, parce que le propre du verbe étant d'affirmer, il faut qu'il y ait quelque chose dont on affirme, ce qui est le sujet ou le nominatif du verbe, quoique devant les infinitifs il soit à l'accusatif : scio Petrum esse doctum.

La troisième, qu'il n'y peut avoir d'adjectif qui n'ait rapport à un substantif, parce que l'adjectif marque confusément un substantif, qui est le sujet de la forme qui est marquée distinctement par cet adjectif: Doctus, savant, a rapport à quelqu'un qui soit savant.

La quatrième, qu'il n'y a jamais de génitif dans le discours, qui ne soit gouverné d'un autre nom; parce que ce cas marquant toujours ce qui est comme le possesseur, il faut qu'il soit gouverné de la chose possédée. C'est pourquoi ni en grec, ni en latin, aucun verbe ne gouverne proprement le génitif, comme on l'a fait voir dans les Nouvelles Méthodes pour ces langues. Cette règle peut être plus difficilement appliquée aux langues vulgaires, parce que la particule de, qui est la marque du génitif, se met souvent pour la préposition ex ou de.

La cinquième, que le régime des verbes est souvent pris de diverses espèces de rapports enfermés dans les cas, suivant le caprice de l'usage, ce qui ne change pas le rapport spécifique à chaque cas, mais fait voir que l'usage en a pu choisir tel ou tel à sa fantaisie.

Ainsi l'on dit en latin juvare aliquem, et l'on dit, opitulari alicui, quoique ce soit deux verbes d'aider, parce qu'il a plu aux Latins de regarder le régime du premier verbe, comme le terme où passe son action, et celui du second comme un cas d'attribution, à laquelle l'action du verbe avoit rapport.

Ainsi l'on dit en françois, servir quelqu'un, et servir à quelque chose.

Ainsi, en espagnol, la plupart des verbes actifs gouvernent indifféremment le datif ou l'accusatif.

Ainsi un même verbe peut recevoir divers régimes, sur-tout en y mêlant celui des prépositions, comme

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