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præstare alicui, ou aliquem, surpasser quelqu'un. Ainsi l'on dit, par exemple, eripere morti aliquem, ou mortem alicui, ou aliquem à morte; et semblables.

Quelquefois même ces divers régimes ont la force de changer le sens de l'expression, selon que l'usage de la langue l'a autorisé : car, par exemple, en latin cavere alicui, est veiller à sa conservation, et cavere aliquem, est se donner de garde de lui; en quoi il faut toujours consulter l'usage dans toutes les langues.

Des figures de construction.

CE que nous avons dit ci-dessus de la syntaxe, suffit pour en comprendre l'ordre naturel, lorsque toutes les parties du discours sont simplement exprimées, qu'il n'y a aucun mot de trop ni de trop peu, et qu'il est conforme à l'expression naturelle de nos pensées.

Mais parce que les hommes suivent souvent plus le sens de leurs pensées, que les mots dont ils se servent pour les exprimer, et que souvent, pour abréger, ils retranchent quelque chose du discours, ou bien que, regardant à la grace, ils y laissent quelque mot qui semble superflu, ou qu'ils en renversent l'ordre naturel; de là est venu qu'ils ont introduit quatre façons de parler, qu'on nomme figurées, et qui sont comme autant d'irrégularités dans la Grammaire,

quoiqu'elles soient quelquefois des perfections et des beautés dans la langue.

Celle qui s'accorde plus avec nos pensées, qu'avec les mots du discours, s'appelle SYLLEPSE, ou Conception; comme quand je dis, il est six heures: car, selon les mots, il faudroit dire, elles sont six heures, comme on le disoit même autrefois, et comme on dit encore, ils sont six, huit, dix, quinze hommes, etc. Mais parce que ce que l'on prétend n'est que de marquer un temps précis, et une seule de ces heures, savoir, la sixième, ma pensée qui se jette sur cellelà, sans regarder aux mots, fait que je dis, il est six heures, plutôt, qu'elles sont six heures.

Et cette figure fait quelquefois des irrégularités contre les genres, comme ubi est scelus qui me perdidit? contre les nombres, comme, turba ruunt; contre les deux ensemble, comme, pars mersi tenuêre ratem, et semblables.

Celle qui retranche quelque chose du discours s'appelle ELLYPSE, ou Défaut; car quelquefois on sous-entend le verbe, ce qui est très-ordinaire en hébreu, où le verbe substantif est presque toujours sous-entendu ; quelquefois le nominatif, comme pluit, pour Deus, ou natura pluit; quelquefois le substantif, dont l'adjectif est exprimé: paucis te volo, sup. verbis alloqui; quelquefois le mot qui en gouverne un autre, comme: est Romæ, pour est in urbe Romæ ; et quelquefois celui qui est gouverné, comme faci

Liùs reperias, (sup. homines) Romam proficiscantur, quàm qui Athenas. Cic.

La façon de parler qui a quelques mots de plus qu'il ne faut s'appelle PLÉONASME, ou Abondance : comme, vivere vitam, magis major, etc.

Et celle qui renverse l'ordre naturel du discours, s'appelle HYPERBATE, ou Renversement.

On peut voir des exemples de toutes ces figures dans les Grammaires des langues particulières, et surtout dans les Nouvelles Méthodes que l'on a faites pour la grecque et pour la latine, où on en a part assez amplement.

J'ajouterai seulement qu'il n'y a guère de langue qui use moins de ces figures que la nôtre, parce qu'elle aime particulièrement la netteté, et à exprimer les choses autant qu'il se peut, dans l'ordre le plus naturel et le plus désembarrassé, quoiqu'en même temps elle ne cède à aucune en beauté ni en élégance.

DE M. DUCLOS.

PREMIÈRE PARTIE.

CHAPITRE PREMIER.

LES Grammairiens reconnoissent plus ou moins de sons dans une langue, selon qu'ils ont l'oreille plus ou moins sensible, et qu'ils sont plus ou moins capables de s'affranchir du préjugé.

Ramus avoit déja remarqué dix voyelles dans la langue françoise, et MM. de P. R. ne diffèrent de lui sur cet article, qu'en ce qu'ils ont senti que au n'étoit autre chose qu'un o écrit avec deux caractères; aigu et bref dans Paul, grave et long dans hauteur. Ce même son simple s'écrit avec trois ou quatre caractères, dont aucun n'en est le signe propre; par exemple, dans tombeau, dont les trois caractères de la dernière syllabe ne font qu'un o aigu et bref, et dans tombeaux, dont les quatre derniers caractères ne représentent que le son d'un o grave et long que P. R. a substitué à l'au de Ramus. Notre orthographe est pleine de ces combinaisons fausses et inutiles. Il est assez singulier que l'abbé de Dangeau, qui avoit réfléchi avec esprit sur les sons de la langue, et qui connoissoit bien la Grammaire

de P. R., ait fait la même méprise que Ramus sur le son au, tandis que Wallis, un étranger, ne s'y est pas mépris. C'est que Wallis ne jugeoit les sons que d'oreille, et l'on n'en doit juger que de cette manière, en oubliant absolument celle dont ils s'écrivent.

MM. de P. R. n'ont pas marqué toutes les voyelles qu'ils pouvoient aisément reconnoître dans notre langue; ils n'ont rien dit des nasales. Les Latins en avoient quatre finales qui terminent les mots Romam, urbem, sitim, templum, et autres semblables. Ils les regardoient si bien comme des voyelles, que dans les vers ils en faisoient l'élision devant la voyelle initiale du mot suivant. Ils pouvoient aussi avoir l'o nasal, tel que dans bombus, pondus, etc., mais il n'étoit jamais final, au lieu que les quatre autres nasales étoient initiales, médiales et finales.

Je dis qu'ils pouvoient avoir l'o nasal; car pour en être sûr, il faudroit qu'il y eût des mots purement latins, terminés en om ou on, faisant élision avec la voyelle initiale d'un mot suivant, et je ne connois cette terminaison que dans la négation non, qui ne fait pas élision. Si l'on trouve quelquefois servom pour servum, com pour cum, etc., on trouve aussi dans quelques éditions un u au-dessus de l'o, pour faire voir que ce ne sont que deux manières d'écrire le même son, ce qui ne feroit pas une nasale de plus. Nous ne sommes pas en état de juger de la prononciation des langues mortes. La lettre m qui suit une voyelle avec laquelle elle s'unit, est toujours la lettre caractéristique des nasales finales des Latins. A l'égard des nasales initiales et médiales, ils faisoient le même usage que nous des lettres m et n. Nous avons quatre nasales qui se trouvent dans ban,

bien,

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