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les adjectifs : mais, parce qu'on les regarde souvent avec les divers rapports qu'elles ont les unes aux autres, une des inventions dont on s'est servi en quelques langues pour marquer ces rapports, a été de donner encore aux noms diverses terminaisons, qu'ils ont appelées des du latin cadere, tomber, comme étant les diverses chutes d'un même mot.

cas,

Il est vrai que, de toutes les langues, il n'y a peut-être que la grecque et la latine qui aient proprement des cas dans les noms. Néanmoins, parce qu'aussi il y a peu de laugues qui n'aient quelques sortes de cas dans les pronoms, et que sans cela on ne sauroit bien entendre la liaison du discours, qui s'appelle construction, il est presque nécessaire, pour apprendre quelque langue que ce soit, de savoir ce qu'on entend par ces cas : c'est pourquoi nous les expliquerons l'un après l'autre le plus clairement qu'il nous sera possible.

Du Nominatif.

La simple position du nom s'appelle le nominatif, qui n'est pas proprement un cas, mais la matière d'où se forment les cas par les divers changemens qu'on donne à cette première terminaison du nom. Son principal usage est d'être mis dans le discours avant tous les verbes, pour être le sujet de la proposition. Dominus regit me, le Seigneur me conduit. Deus exaudit me, Dieu m'écoute.

Du Vocatif.

Quand on nomme la personne à qui on parle, ou la chose à laquelle on s'adresse, comme si c'étoit une personne, ce nom acquiert par-là un nouveau rapport, qu'on a quelquefois marqué par une nouvelle terminaison qui s'appelle vocatif. Ainsi de Dominus au nominatif, on a fait Domine au vocatif; d'Antonius, Antoni. Mais comme cela n'étoit pas beaucoup nécessaire, et qu'on pouvoit employer le nominatif à cet usage, de là il est arrivé :

1o. Que cette terminaison différente du nominatif n'est point au plurier.

2o. Qu'au singulier même elle n'est en latin qu'en la seconde déclinaison.

3°. Qu'en grec, où elle est plus commune, on la né→ glige souvent, et on se sert du nominatif au lieu du vocatif, comme on peut voir dans la version grecque des Pseaumes, d'où S. Paul cite ces paroles dans l'Épître aux Hébreux pour prouver la divinité de Jésus-Christ, θρονός σᾶ, ὁ θεὸς, ou il est clair que ὁ θεὸς est un nomi natif pour un vocatif; le sens n'étant pas Dieu est votre trône, mais votre trône, ô Dieu, demeurera, etc.

4°. Et qu'enfin on joint quelquefois des nominatifs avec des vocatifs. Domine, Deus meus. Nate, meœ vires, mea magna potentia solus. Sur quoi l'on peut voir la Nouv. Méth, lat. Remarq. sur les Pronoms.

En notre langue, et dans les autres vulgaires, ce cas

s'exprime dans les noms communs qui ont un article au nominatif, par la suppression de cet article. Le Seigneur est mon espérance. Seigneur, vous êtes mon espérance.

Du Génitif.

en

Le rapport d'une chose qui appartient à une autre, quelque manière que ce soit, a fait donner dans les langues qui ont des cas, une nouvelle terminaison aux noms, qu'on a appelée le génitif, pour exprimer ce rapport général, qui se diversifie ensuite en plusieurs espèces, telles que sont les rapports:

Du tout à la partie. Caput hominis.

De la partie au tout. Homo crassi capitis.

Du sujet à l'accident ou l'attribut. Color rosa. Misericordia Dei.

De l'accident au sujet. Puer optimæ indolis.

De la cause efficiente à l'effet. Opus Dei. Oratio Cicoronis.

De l'effet à la cause. Creator mundi.

De la cause finale à l'effet. Potio soporis.
De la matière au composé. Vas auri.

De l'objet aux actes de notre âme. Cogitatio belli. Contemptus mortis.

Du possesseur à la chose possédée. Pecus Meliboi. Divitiæ Cræsi.

Du nom propre au commun, ou de l'individu à l'espèce. Oppidum Lugduni,

Et comme entre ces rapports il y en a d'opposés, cela cause quelquefois des équivoques. Car dans ces paroles, vulnus Achillis, le génitif Achillis peut signifier ou le rapport du sujet, et alors cela se prend passivement pour la plaie qu'Achille a reçue; ou le rapport de la cause, et alors cela se prend activement pour la plaie qu'Achille a faite. Ainsi dans ce passage de S. Paul : Certus sum quià neque mors, neque vita, etc. poterit nos separare à charitate Dei in Christo Jesu Domino nostro; le génitif Dei a été pris en deux sens différens par les interprêtes : les uns y ont donné le rapport de l'objet, ayant expliqué ce passage de l'amour que les élus portent à Dieu en Jésus-Christ; et les autres y ont donné le rapport du sujet, l'ayant expliqué de l'amour que Dieu porte aux élus en Jésus-Christ.

Quoique les noms hébreux ne se déclinent point par cas, néanmoins ce rapport exprimé par ce génitif, cause un changement dans les noms, mais tout différent de celui de la langue grecque et de la latine : car au lieu que dans ces langues on change le nom qui est régi, dans l'hébreu on change celui qui régit; comme verbum falsitatis, où le changement ne se fait pas dans falsitas, mais dans pour verbum.

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On se sert d'une particule dans toutes les langues vulgaires, pour exprimer le génitif, comme est de dans la nôtre; Deus, Dieu; Dei, de Dieu.

Ce que nous avons dit, que le génitif servoit à marquer le rapport du nom propre au nom commun, ou, ce qui est la même chose, de l'individu à l'espèce, est bien plus ordinaire en françois qu'en latin; car en latin on met souvent le nom commun et le nom propre au même cas : ce qu'on appelle apposition: Urbs Roma, Fluvius Sequana, Mons Parnassus : au lieu qu'en françois l'ordinaire dans ces rencontres est de mettre le nom propre au génitif: la Ville de Rome, la Rivière de Seine, le Mont de Parnasse.

Du Datif.

Il y a encore un autre rapport, qui est de la chose au profit ou au dommage de laquelle d'autres choses se rapportent. Les langues qui ont des cas, ont encore un mot pour cela, qu'ils ont appelé le datif, et qui s'étend encore à d'autres usages qu'il est presque impossible de marquer en particulier. Commodare Socrati, prêter à Socrate. Utilis Reipublicæ, utile à la République. Perniciosus Ecclesiæ, pernicieux à l'Eglise. Promittere amico, promettre à un ami. Visum est Platoni, il a semblé à Platon. Affinis Regi, allié au Roi, etc. Les langues vulgaires marquent encore ce cas par une particule, comme est à en la nôtre, ainsi qu'on peut voir dans les exemples ci-dessus.

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