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CHAPITRE IX.

Du Pronom appelé relatif.

Il y a encore un autre pronom, qu'on appelle relatif, qui,

, quæ, quod: Qui, lequel, laquelle.

Ce pronom relatif a quelque chose de commun avec les autres pronoms, et quelque chose de propre.

Ce qu'il a de commun, est qu'il se met au lieu du nom; et plus généralement même que tous les autres pronoms, se mettant pour toutes les personnes. Moi QUI suis chrétien: Vous QUI étes chrétien: Lui QUI est roi.

Ce qu'il a de propre peut être considéré en deux

manières :

La 1. en ce qu'il a toujours rapport à un autre nom ou pronom, qu'on appellé antécédent, comme Dieu qui est saint. Dieu est l'antécédent du relatif qui. Mais cet antécédent est quelquefois sous-entendu et non exprimé, sur-tout dans la langue latine, comme on l'a fait voir dans la Nouvelle Méthode pour cette langue.

La 2°. chose que le relatif a de propre et que je ne sache point avoir encore été remarquée par personne, est que la proposition dans laquelle il entre (qu'on peut appeler incidente), peut faire partie du sujet

ou de l'attribut d'une autre proposition, qu'on peut appeler principale.

On ne peut bien entendre ceci, qu'on ne se sou→ vienne de ce que nous avons dit dès le commencement de ce discours, qu'en toute proposition il y a un sujet, qui est ce dont on affirme quelque chose, et un attribut, qui est ce qu'on affirme de quelque chose. Mais ces deux termes peuvent être ou simples, comme quand je dis: Dieu est bon: ou complexes, comme quand je dis : Un habile magistrat est un homme utile à la république. Car ce dont j'affirme n'est pas seulement un magistrat, mais un habile magistrat et ce que j'affirme n'est pas seulement qu'il est homme, mais qu'il est homme utile à la république. On peut voir ce qui a été dit dans la Logique ou Art de penser, sur les propositions complexes. Part. 2, chap. 3, 4, 5 et 6.

Cette union de plusieurs termes dans le sujet et dans l'attribut est quelquefois telle, qu'elle n'empêche pas que la proposition ne soit simple, ne contenant en soi qu'un seul jugement ou affirmation, comme quand je dis : La valeur d'Achille a été cause de la prise de Troie. Ce qui arrive toujours toutes les fois que des deux substantifs qui entrent dans le sujet ou l'attribut de la proposition, l'un est régi par l'autre.

Mais d'autres fois aussi, ces sortes de propositions dont le sujet ou l'attribut sont composés de plusieurs termes, enferment, au moins dans notre esprit, plu

sieurs jugemens, dont on peut faire autant de propositions; comme quand je dis: Dieu invisible a créé le monde visible: il se passe trois jugemens dans mon esprit, renfermés dans cette proposition. Car je juge premièrement que Dieu est invisible. 2. Qu'il a créé le monde. 3. Que le monde est visible. Et de ces trois propositions, la seconde est la principale et l'essentielle de la proposition: mais la première et la troisième ne sont qu'incidentes, et ne font que partie de la principale, dont la première en compose le sujet, et la dernière l'attribut.

Or ces propositions incidentes sont souvent dans notre esprit, sans être exprimées par des paroles, comme dans l'exemple proposé. Mais quelquefois aussi on les marque expressément; et c'est à quoi sert le relatif comme quand je réduis le même exemple à ces termes: Dieu, QUI est invisible, a créé le monde, QUI est visible.

Voilà donc ce que nous avons dit être propre au relatif, de faire que la proposition dans laquelle il entre puisse faire partie du sujet ou de l'attribut d'une autre proposition.

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Sur quoi il faut remarquer, 1. que lorsqu'on joint ensemble deux noms dont l'un n'est pas en régime, mais convient avec l'autre, soit par apposition, comme Urbs Roma, soit comme adjectif, comme Deus sanctus, sur-tout si cet adjectif est un participe, canis currens, toutes ces façons de parler enferment le relatif

dans

dans le sens, et se peuvent résoudre par le relatif : Urbs quæ dicitur Roma: Deus qui est sanctus : Canis qui currit: et qu'il dépend du génie des langues de se servir de l'une ou de l'autre manière. Et ainsi nous voyons qu'en latin on emploie d'ordinaire le participe: Video canem currentem : et en françois le relatif: Je vois un chien qui court.

2. J'ai dit que la proposition du relatif peut faire partie du sujet ou de l'attribut d'une autre proposition qu'on peut appeler principale: car elle ne fait jamais ni le sujet entier, ni l'attribut entier; mais

il

y faut joindre le mot dont le relatif tient la place, pour en faire le sujet entier, et quelque autre mot pour en faire l'attribut entier. Par exemple, quand je dis: Dieu qui est invisible, est le créateur du monde, qui est visible. Qui est invisible n'est pas tout le sujet de cette proposition, mais il y faut ajouter Dieu : et qui est visible n'en est pas tout l'attribut, mais il faut ajouter le Créateur du monde.

y

3. Le relatif peut être ou sujet ou partie de l'attribut de la proposition incidente. Pour en être sujet, il faut qu'il soit au nominatif; qui creavit mundum; qui

sanctus est.

Mais quand il est à un cas oblique; génitif, datif, accusatif, alors il fait, non pas l'attribut entier de cette proposition incidente, mais seulement une partie : Deus quem amo; Dieu que j'aime. Le sujet de la proposition est ego, et le verbe fait la liaison et une partie de l'attri

but, dont quem fait une autre partie; comme s'il y avoit ego amo quem, ou ego sum amans quem. Et de même Cujus cœlum sedes, duquel le ciel est le trône. Ce qui est toujours comme si l'on disoit: Coelum est sedes cujus: Le ciel est le trône duquel.

Néanmoins dans ces rencontres même, on met toujours le relatif à la tête de la proposition (quoi

que, selon le sens, il ne dût être qu'à la fin), si ce n'est qu'il soit gouverné par une préposition; car la préposition précède, au moins ordinairement : Deus à quo mundus est conditus: Dieu par qui le monde a été créé.

SUITE DU MÊME CHAPITRE.

Diverses difficultés de Grammaire, qu'on peut expliquer par ce principe.

Св que nous avons dit des deux usages du relatif, l'un d'être pronom, et l'autre de marquer l'union d'une proposition avec une autre, sert à expliquer plusieurs choses dont les grammairiens sont bien empêchés de rendre raison.

Je les réduirai ici en trois classes, et j'en donnerai quelques exemples de chacune.

La première, où le relatif est visiblement pour une conjonction, et un pronom démonstratif.

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