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4. Dans les propositions négatives, les termes sur lesquels tombe la négation, sont déterminés à être pris généralement par la négation même, dont le propre est de tout ôter. C'est la raison pourquoi on dit affirmativement avec l'article: Il a de l'argent, du cœur, de la charité, de l'ambition; et négativement sans article Il n'a point d'argent, de cœur, de charité, d'ambition. Et c'est ce qui montre aussi que ces façons de parler ne sont pas contraires à la règle : Il n'y a point d'injustice qu'il ne commette. Il n'y a homme qui sache cela. Ni même celle-ci : Est-il ville dans le royaume qui soit plus obéissante? parce que l'affirmation avec un interrogant, se réduit dans le sens à une négation : Il n'y a point de ville qui soit plus obéissante.

5. C'est une règle de logique très-véritable, que, dans les propositions affirmatives, le sujet attire à soi l'attribut, c'est-à-dire, le détermine. D'où vient que ces raisonnemens sont faux : L'homme est animal, le singe est animal, donc le singe est homme ; parce que, animal étant attribut dans les deux premières propositions, les deux divers sujets se déterminent à deux diverses sortes d'animal. C'est pourquoi ce n'est point contre la règle de dire: Je suis homme qui parle franchement, parce que homme est déterminé par je : ce qui est si vrai, que le verbe qui suit le qui, est mieux à la première personne qu'à la troisième. Je suis homme qui ai bien vu

des choses, plutôt que, qui a bien vu des choses.

6. Les mots sorte, espèce, genre, et semblables, déterminent ceux qui les suivent, qui pour cette raison ne doivent point avoir d'article. Une sorte de fruit, et non pas d'un fruit. C'est pourquoi c'est bien dit : Une sorte de fruit qui est mûr en hiver. Une espèce de bois qui est fort dur.

rex,

7. La particule en, dans le sens de l'ut latin, vivit ut il vit en roi, enferme en soi-même l'article valant autant, que comme un roi, en la manière d'un roi. C'est pourquoi ce n'est point contre la règle de dire Il agit en roi qui sait régner. Il parle en homme qui sait faire ses affaires; s affaires; c'est-à-dire, comme un roi, ou comme un homme, etc.

8. De, seul avec un plurier, est souvent pour des, qui est le plurier de l'article un, comme nous avons montré dans le chapitre de l'Article. Et ainsi ces façons de parler sont très-bonnes, et ne sont point contraires à la règle : Il est accablé de maux qui lui font perdre patience. Il est chargé de dettes qui vont au-delà de son bien.

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9. Ces façons de parler, bonnes ou mauvaises : C'est gréle qui tombe; ce sont gens habiles qui m'ont dit cela, ne sont point contraires à la règle, parce que le qui ne se rapporte point au nom qui est sans article, mais à ce, qui est de tout genre et de tout nombre. Car le nom sans article gréle, gens habiles, est ce que j'affirme, et par conséquent l'attribut, et le qui

fait partie du sujet dont j'affirme. Car j'affirme de ce qui tombe, que c'est de la gréle; de ceux qui m'ont dit cela, que ce sont des gens habiles : et ainsi le qui ne se rapportant point au nom sans article, cela ne regarde point cette règle.

S'il y a d'autres façons de parler qui y semblent contraires, et dont on ne puisse pas rendre raison par toutes ces observations, ce ne pourront être, comme je le crois, que des restes du vieux style, où on omettoit presque toujours les articles. Or c'est une maxime que ceux qui travaillent sur une langue vivante, doivent toujours avoir devant les yeux, que les façons de parler qui sont autorisées par un usage général et non contesté, doivent passer pour bonnes, encore qu'elles soient contraires aux règles et à l'analogie de la langue; mais qu'on ne doit pas les alléguer pour faire douter des règles et troubler l'analogie, ni pour autoriser, par conséquent, d'autres façons de parler que l'usage n'auroit pas autorisées. Autrement, qui ne s'arrêtera qu'aux bizarreries de l'usage, sans observer cette maxime, fera qu'une langue demeurera toujours incertaine, et que, n'ayant aucuns principes, elle ne pourra jamais se fixer.

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CHAPITRE X I.

Des Prépositions.

Nous avons dit ci-dessus, chap. 6, que les cas et les prépositions avoient été inventés pour le même usage, qui est de marquer les rapports que les choses ont les unes aux autres.

Ce sont presque les mêmes rapports dans toutes les langues, qui sont marqués par les prépositions : c'est pourquoi je me contenterai de rapporter ici les principaux de ceux qui sont marqués par les prépositions de la langue françoise, sans m'obliger à en faire un dénombrement exact, comme il seroit nécessaire pour une Grammaire particulière.

Je crois donc qu'on peut réduire les principaux de ces rapports à ceux

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Il y a quelques remarques à faire sur les prépositions, tant pour toutes les langues, que pour la françoise en particulier.

La 1. est qu'on n'a suivi en aucune langue, sur le sujet des prépositions, ce que la raison auroit, desiré, qui est qu'un rapport ne fût marqué que par une préposition, et qu'une même préposition ne marquât qu'un seul rapport. Car il arrive au contraire dans toutes les langues, ce que nous avons vu dans ces exemples pris de la françoise, qu'un même rapport est signifié par plusieurs prépositions, comme dans, en, à; et qu'une même préposition, comme en, à, marque divers rapports. C'est ce qui cause sou

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