Imágenes de páginas
PDF
EPUB

liùs reperias, (sup. homines) Romam proficiscantur, quàm qui Athenas. Cic.

La façon de parler qui a quelques mots de plus qu'il ne faut s'appelle PLÉONASME, ou Abondance: comme, vivere vitam, magis major, etc.

Et celle qui renverse l'ordre naturel du discours, s'appelle HYPERBATE, ou Renversement.

On peut voir des exemples de toutes ces figures dans les Grammaires des langues particulières, et surtout dans les Nouvelles Méthodes que l'on a faites pour la grecque et pour la latine, où on en a parlé assez amplement.

J'ajouterai seulement qu'il n'y a guère de langue qui use moins de ces figures que la nôtre, parce qu'elle aime particulièrement la netteté, et à exprimer les choses, autant qu'il se peut, dans l'ordre le plus naturel et le plus désembarrassé, quoiqu'en même temps elle ne cède à aucune en beauté ni en élégance.

COMMENTAIRE

DE M. DUCLOS.

PREMIÈRE PARTIE.

CHAPITRE PREMIER.

LES Grammairiens reconnoissent plus ou moins de sons dans une langue, selon qu'ils ont l'oreille plus ou moins sensible, et qu'ils sont plus ou moins capables de s'affranchir du préjugé.

Ramus avoit déja remarqué dix voyelles dans la langue françoise, et MM. de P. R. ne diffèrent de lui sur cet article, qu'en ce qu'ils ont senti que au n'étoit autre chose qu'un o écrit avec deux caractères; aigu et bref dans Paul, grave et long dans hauteur. Ce même son simple s'écrit avec trois ou quatre caractères, dont aucun n'en est le signe propre; par exemple, dans tombeau, dont les trois caractères de la dernière syllabe ne font qu'un o aigu et bref, et dans tombeaux, dont les quatre derniers caractères ne représentent que le son d'un o grave et long que P. R. a substitué à l'au de Ramus. Notre orthographe est pleine de ces combinaisons fausses et inutiles. Il est assez singulier què l'abbé de Dangeau, qui avoit réfléchi avec esprit sur les sons de la langue, et qui connoissoit bien la Grammaire

de P. R., ait fait la même méprise que Ramus sur le son au, tandis que Wallis, un étranger, ne s'y est pas mépris. C'est que Wallis ne jugeoit les sons que d'oreille, et l'on n'en doit juger que de cette manière, en oubliant absolument celle dont ils s'écrivent.

MM. de P. R. n'ont pas marqué toutes les voyelles qu'ils pouvoient aisément reconnoître dans notre langue; ils n'ont rien dit des nasales. Les Latins en avoient quatre finales qui terminent les mots Romam, urbem, sitim, templum, et autres semblables. Ils les regardoient si bien comme des voyelles, que dans les vers ils en faisoient l'élision devant la voyelle initiale du mot suivant. Ils pouvoient aussi avoir l'o nasal, tel que dans bombus, pondus, etc., mais il n'étoit jamais final, au lieu que les quatre autres nasales étoient initiales, médiales et finales.

pas

Je dis qu'ils pouvoient avoir l'o nasal; car pour en être sûr, il faudroit qu'il y eût des mots purement latins, terminés en om ou on, faisant élision avec la voyelle initiale d'un mot suivant, et je ne connois cette terminaison que dans la négation non, qui ne fait élision. Si l'on trouve quelquefois servom pour servum, com pour cum, etc., on trouve aussi dans quelques éditions un u au-dessus de l'o, pour faire voir que ce ne sont que deux manières d'écrire le même son, ce qui ne feroit pas une nasale de plus. Nous ne sommes pas en état de juger de la prononciation des langues mortes. La lettre m qui suit une voyelle avec laquelle elle s'unit, est toujours la lettre caractéristique des nasales finales des Latins. A l'égard des nasales initiales et médiales, ils faisoient le même usage que nous des lettres m et n. Nous avons quatre nasales qui se trouvent dans ban,

bien,

bien, bon, brun. L'u nasal se prononce toujours eun; c'est un eu nasal. Il faut observer que nous ne considérons ici nos nasales que relativement au son, et non pas à l'orthographe, parce qu'une même nasale s'écrit souvent d'une manière très-différente. Par exemple, l'a nasal s'écrit différemment dans antre et dans embrasser. L'e nasal s'écrit de cinq manières différentes, pain, bien, frein, faim, vin. Notre orthographe est si vicieuse, qu'il n'y faut avoir aucun égard en parlant des sons de la langue; on ne doit consulter que l'oreille.

Plusieurs Grammairiens admettent un i nasal, encore le bornent-ils à la syllabe initiale et négative qui répond à l'a privatif des Grecs, comme ingrat, injuste, infidèle, etc.; mais c'est un son provincial qui n'est d'usage ni à la Cour, ni à la ville. Il est vrai que l'i nasal s'est introduit au théâtre, mais il n'en est pas moins vicieux, puisqu'il n'est pas autorisé par le bon usage, auquel le théâtre est obligé de se conformer, comme la chaire et le barreau. On prononce assez généralement bien au théâtre; mais il ne laisse pas de s'y trouver quelques prononciations vicieuses, que certains acteurs tiennent de leur province ou d'une mauvaise tradition. L'in négatif n'est jamais nasal, lorsqu'il est suivi d'une voyelle; alors l'i est pur, et le n modifie la voyelle suivante. Exemple, i-nutile, i-nouie, i-nattendu, etc. Lorsque le son est nasal, comme dans inconstant, ingrat, etc., c'est un e nasal pour l'oreille, quoiqu'il soit écrit avec un i; ainsi on doit prononcer ainconstant, aingrat.

Si nous joignons nos quatre nasales aux dix voyelles reconnues par MM. de P. R., il y en aura déja quatorze; mais puisqu'ils distinguent trois e et deux o, pourquoi n'admetBb

toient-ils deux pas

et le

[blocks in formation]

dans páte, massa farinacea, et påte, pes; et deux eu, comme dans jeûne, jejunium, et jeune, juvenis? L'aigū diffèrent par le son, indépendamment de leur grave quantité. On doit encore faire à l'égard de l'e ouvert la même distinction du grave et de l'aigu, tels qu'ils sont dans tête et těte. Ainsi nous avons au moins quatre e différens, e fermé dans bonté, e ouvert grave dans tête, caput, ouvert aigu dans těte, uber, e muet dans la dernière syllabe de tombe. L'e muet n'est proprement que la voyelle eu, sourde et affoiblie. J'en pourrois compter un cinquième, qui est moyen entre l'é fermé et l'è ouvert bref. Tel est le second e de préfère, et le premier de succède; mais n'étant pas aussi sensible que les autres e, il ne seroit pas généralement admis. Cependant il se rencontre assez souvent, et deviendra peut-être encore plus usité qu'il ne l'est.

[ocr errors]

Je me permettrai ici une réflexion sur le penchant que nous avons à rendre notre langue molle, efféminée et monotone, Nous avons raison d'éviter la rudesse dans la prononciation, mais je crois que nous tombons trop dans le défaut opposé. Nous prononcions autrefois beaucoup plus de diphtongues qu'aujourd'hui ; elles se prononçoient dans les temps des verbes, tels que j'avois, j'aurois, et dans plusieurs noms, tels que François, Anglois, Polonois, au lieu que nous prononçons aujourd'hui j'avès, j'aurès, Françès, Anglès, Polonès. Cependant ces diphtongues mettoient de la force et de la variété dans la prononciation, et la sauvoient d'une espèce de monotonie qui vient, en partie, de notre multitude d'e muets.

La même négligence de prononciation fait que plusieurs e

« AnteriorContinuar »