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estrangeria ou d'innationalité; 3° que l'exemption de tout droit sur le sucre expédié en Europe, accordée par l'ordre royal du 16 janvier 1788, est étendue à celui expédié dans les ports de l'Amérique méridionale et des colonies étrangères; 40 qu'aucun droit d'alcabala de mar ou d'exportation ne sera perçu sur les produits, en considération de celui que paie le marchand à l'achat de ces produits aux cultivateurs; 5° que, enfin, toute marchandise reçue en transit pour les ports de l'Amérique méridionale sera affranchie de tout droit, celui du trésor royal compris, et que la marchandise expédiée de ce port dans ceux de moindre importance aura droit au drawback des droits payés à son importation. Dans cet ordre royal, il était demandé au gouverneur de proposer à la cour d'Espagne un système d'impôts sur le commerce, en vue d'en simplifier la perception, de protéger l'agriculture et de baser la contribution sur le principe d'une juste répartition (1). Mais cet ordre ne fut jamais exécuté. Chose digne de remarque, et qui témoigne hautement du changement qu'opéra la Révolution française dans les sentiments du gouverneur Chacon à l'égard de la colonisation de l'île, c'est que cet homme, naguère si dévoué à la prospérité de la colonie, rejeta, dans cette circonstance, les faveurs royales. I croit prudent, disent les archives du cabildo, de suspendre la publication des privilèges et exemptions que le roi a daigné accorder, et, en particulier, la faculté d'exporter le sucre, libre de tout

(1) Meany, Abstract of the minutes of Cabildo, 1733-1813, ms., p. 145 et seq.

droit, aux colonies étrangères, prenant en considération que la colonie jouit d'une entière exemption de droits et d'impôts, sauf celui bien modéré de 3 1/4 pour 100 que S. M. daigne supprimer, dans la pensée que cette suppression est d'une nécessité absolue pour la prospérité de l'île; mais qu'il est autant du devoir et de l'honneur de la colonie de remercier le roi de sa faveur royale que de renoncer en faveur du trésor à ceux de ces privilèges qui ne sont pas d'une nécessité absolument urgente. » Le motif allégué pour cet acte singulier de renonciation est la pauvreté du trésor par suite de la présente guerre (1); » comme si l'Espagne pouvait avoir besoin d'arrêter l'essor d'une petite colonie naissante pour subvenir à ses dépenses !

L'année suivante, 1795, l'Espagne promut le gouverneur Chacon au grade de brigadier de la marine royale (2), grade correspondant à celui de commodore de la marine anglaise, et équivalant à celui de capitaine de vaisseau en chef de la marine française. C'était le récompenser de ses services, sans doute bien méritoires pour la colonisation de l'île; mais on ne peut que regretter que cette récompense lui ait été accordée lorsque déjà il avait cessé d'être utile au pays. C'était alors qu'il eût fallu fe remplacer, au contraire, par un esprit moins prévenu contre les Français, puisque l'Espagne, peu de temps après, heureuse de finir la

(1) Meany, Abstract of the minutes of Cabildo, 1733-1813, ms., p. 146.

(2) Id., ibid., p. 156.

guerre avec la France, décernait à son ministre Godoy, duc d'Alcudia, le titre de prince de la Paix. Mais le gouverneur, apparemment, laissait ignorer à la métropole ce qui se passait à dix-huit cents lieues d'elle.

CHAPITRE XII

VIOLATION DE LA NEUTRALITÉ DE L'ESPAGNE A LA TRINIDAD. DÉCLARATION DE GUERRE A L'ANGLETERRE

(1796)

Le formidable armement préparé par l'Angleterre, en 1795, pour la pacification des îles françaises, et la conquête des établissements hollandais de la Guyane et des îles espagnoles de la Trinidad et de Porto-Rico, ne put parvenir à la Barbade, contrarié par le mauvais temps, qu'au mois d'avril de l'année suivante. La flotte expéditionnaire, commandée par l'amiral Christian, comptait, entre navires de guerre et transports, audelà de deux cents voiles, portant vingt-cinq mille hommes de troupe, sous les ordres de Sir Ralph Abercromby, général très estimé qui devait s'illustrer plus tard en Égypte, à la bataille d'Alexandrie, où il perdit la vie. Le général avait précédé l'expédition, et, dès le 14 février, était arrivé à la Barbade, avec son étatmajor, à bord de la frégate Arethusa (1).

La Hollande ayant déjà déclaré la guerre à l'Angleterre, le premier soin de Sir Ralph Abercromby, en

(1) Bryan Edwards, History of the war in the W. I., t. IV, chap. VI, p. 51 et seq.

recevant ses premières troupes, fut de diriger une expédition contre ses colonies continentales; elle se composa de quatre frégates et d'un nombre de transports suffisant pour un corps de douze cents hommes, duquel il confia le commandement au major-général Whyte. L'entreprise n'offrit aucune difficulté, ces établissements se trouvant alors sans aucun moyen de résistance; ils capitulèrent, Demerari et Essequibo le 22 avril, et Berbice le 2 mai suivant. Immédiatement après, le général dirigea une autre expédition contre l'île de Sainte-Lucie qui se défendit vaillamment devant des forces infiniment supérieures et capitula le 26 mai. Puis il s'occupa des révoltés de Saint-Vincent et de la Grenade, où les troupes anglaises débarquèrent les 8 et 9 juin suivant. Ces intrépides défenseurs de leur nationalité succombèrent aussi sous le nombre de leurs ennemis, mais à la longue; et, après avoir successivement perdu toutes leurs positions, ils leur firent, pendant plusieurs mois encore, une rude guerre de partisans (1).

Cette guerre était entretenue par les corsaires de Victor Hugues, qui fournissaient aux révoltés des approvisionnements de guerre et de bouche (2). Pour la faire cesser, il était indispensable aux Anglais de détruire ces corsaires; le soin en fut confié à la frégate Alarm, de trente-deux canons, capitaine Vaughan, accompagnée de la corvette Zebra, de vingt canons, capitaine Skinner.

(1) Bryan Edwards, History of the war in the W. I., t. IV, chap. vi, p. 54 et seq.

(2) Id., ibid., t. IV, chap. v, p. 11.

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