Imágenes de páginas
PDF
EPUB

rer'. Lorsqu'on chasse le cerf avec des chiens, la bête poursuivie se jette souvent à la nage, et l'on a pour la prendre vivante des pirogues extrêmement courtes, étroites et très-plates qui ne pourraient servir pour une navigation ordinaire.

Dans une des maisons où j'avais séjourné depuis que je voyageais dans le termo de Minas Novas, j'avais été accueilli avec l'hospitalité la plus généreuse ; j'y vivais très-bien, j'y buvais d'excellent vin de Porto, mais j'y éprouvais un désagrément qui compensait tous ces avantages. Affligés d'une maladie de peau qui se communique facilement et que les Français cachent avec beaucoup de soin, mes hôtes ne prenaient aucune peine pour la dissimuler, et ils furent les premiers à m'apprendre qu'ils en étaient atteints. A table comme ailleurs, ils se grattaient, sans aucune cérémonie, entre les doigts et les aisselles, et, après cela, ils coupaient le pain, ou prenaient la main de leurs amis, que cette politesse ne paraissait nullement affliger. J'avais déjà remarqué, dans les différentes parties du Brésil où j'avais été jusqu'alors, que l'on parlait de la gale comme chez nous l'on parle de la fièvre, et que, lorsqu'on était attaqué de la première de ces maladies, on ne craignait nullement de la laisser apercevoir. Il n'est pas nécessaire de fournir d'autres preuves pour montrer combien elle est commune parmi les Brésiliens. Si l'on est peu discret pour la gale, on ne l'est pas

[ocr errors]

Comme on le verra plus tard, ce genre de chasse est également en usage dans le Sertão, ou Désert.

davantage au reste pour d'autres maladies dont on devrait pourtant être plus honteux. Elles sont si répandues, que l'on en cause comme d'un rhume, ou d'un mal de tête; et l'on ne se gêne même pas en présence des femmes et des enfans. Pendant que je voyageais au milieu des catingas, mon domestique prépara un tatou dans une fazenda où je m'étais arrêté. Une des filles de la maison vint réclamer le sang de l'animal, et elle nous dit, sans aucune précaution oratoire, qu'elle voulait en faire un remède pour une maladie syphilitique. Les assistans trouvèrent cela tout simple, et si quelqu'un se mit à rire, ce fut uniquement de la bizarrerie du remède.

CHAPITRE VII.

LA SEPTIÈME DIVISION. LES BOTOCUDOS.

LE JIQUITINHONHA.

Histoire de la 7o division, du

Fin des catingas. -Hameau de S. Miguel; sa position. - Portrait abrégé des Botocudos. Le capitaine JOAHIMA. Jiquitinhonha et des Botocudos de Minas Novas.

Les enfans des Bo

tocudos devenus marchandise. Division de la nation en tribus. - Capitaines des Botocudos. - Noms de cette nation. - Nombre des Botocu

Leurs traits; nudité; ornemens bizarres.

- Chasse.

[ocr errors]

dos. Langue de ces Indiens; prononciation ; vocabulaire. Idées religieuses des Botocudós. Anthropophagie. - Penchant au larcin. Effet singulier que produisent sur les Botocudos les fruits de lecythis et les cocos mangés avec excès. Maladie de ces Indiens; remèdes. — Manière d'enterrer les morts. Mariages; divorce; adultère. - Occupations des femmes.Chants substitués à la parole. — Quelques traits du caractère des Botocudos. Leur amour pour la guerre; deux sortes de flèches. Leurs amusemens ; chansons.-Leur nourriture. Ils mangent deux espèces de larves. · Visite de l'auteur à l'aldea des Botocudos. Description de cet aldea. Joahima refuse de donner un enfant. Scène de reconnaissance. Plaintes en chansons. Danse, Exercice de l'arc. - Arrivée de plusieurs pirogues. Le Jiquitinhonha; sa source; son cours; son embouchure; avantages de sa navigation. Chemin de terre. Rêves de l'auteur.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors][merged small][merged small][ocr errors]

AU-DELA de Bom Jardim, le terrain change de nature. Il n'est plus aussi léger, ni aussi sablonneux, et la fraîcheur y est entretenue par le voisinage de la rivière. En même temps la végétation prend un autre aspect, les arbres ne sont plus dépouillés de leurs

feuilles, et j'eus le plaisir de revoir des fleurs et de marcher sous un berceau de verdure impénétrable aux rayons du soleil; en un mot, j'étais rentré dans la région des forêts.

Ces bois s'étendent, dans un espace d'environ trois à quatre lieues, jusqu'au hameau de S. Miguel, qui est le chef-lieu de la 7o division militaire, et se trouve situé vers l'extrémité du termo de Minas Novas.

Ce hameau a été bâti sur la rive droite du Jiquitinhonha. La maison principale qui sert de caserne au commandant et aux soldats de la division, est un grand bâtiment assez bien construit, dont le toit est couvert en tuiles et dont les murs sont crépis avec de la terre grise. Le reste du hameau se compose d'une rangée de maisonnettes qui s'étendent sur le bord de la rivière, et de quelques autres éparses çà et là. Toutes n'annoncent que l'indigence. Il n'existe aucune église dans le hameau de S. Miguel, et jusqu'à l'époque de mon voyage, on s'était contenté de planter devant la caserne une grande croix, à côté de laquelle un palmier déployait son élégant feuillage.

La vue que l'on découvre de la caserne est charmante. Devant le bâtiment, coule le Jiquitinhonha, dont la largeur est assez considérable. Dans le temps des pluies, ce fleuve remplit son lit, et se déroule avec majesté; mais lors de mon voyage, des rochers s'élevaient çà et là du milieu de ses eaux, et y formaient des îles. Sur la rive gauche se présentent des collines et des montagnes couvertes de bois; mais vis-à-vis la caserne, le terrain a été défriché, et l'on y a bâti une

petite maison. Le Jiquitinhonha, décrivant un détour au-dessus de S. Miguel, et un autre au-dessous du hameau, paraît former un lac fort alongé, borné à ces deux extrémités par des montagnes. Celle qui semble circonscrire ce prétendu lac du côté de la source, présente à son sommet une croupe arrondie; et, du côté de l'embouchure, la vue est arrêtée par une grande chaîne qui offre un mélange pittoresque de bois et de rochers nus. Cette chaîne borde premièrement une rivière qui porte le nom de Rio de S. Miguel, et qui tombe à peu de distance du hameau dans le Jiquitinhonha. C'est en face du confluent que celui-ci forme le coude ou détour dont j'ai parlé plus haut; et la chaîne, perpendiculaire à ce coude, se prolonge le long du fleuve sans changer de direction.

Arrivé à S. Miguel, j'allai présenter au commandant de la division, M. JULIÃO FERNANDES LEÃO, les lettres de recommandation que j'avais pour lui; nous nous étions déjà vus à Villa Rica, et il me reçut parfaite

ment.

Lorsque j'entrai chez lui, quelques Botocudos étaient occupés à y serrer des haricots. Après qu'ils eurent achevé leur travail, ils vinrent sans façon se placer dans la salle; les femmes s'accroupirent, les hommes s'assirent ou s'étendirent par terre; je pus observer les uns et les autres tout à mon aise, et j'avouerai qu'à leur premier abord, j'éprouvai une espèce d'horreur que leur portrait va justifier. Hommes et femmes, tous sont nus. Leur peau jaunâtre, à laquelle le soleil et la malpropreté ont donné une couleur de bistre, est en

« AnteriorContinuar »