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et cherchent à venger celles que reçoivent eux ou leurs proches. Ils sont gais, hardis et courageux. Ils aiment la guerre, et leurs diverses tribus se la font continuellement. Pour augmenter leurs troupes, les chefs s'enlèvent les uns aux autres des femmes et des enfans, et telle est la cause des divisions qui trop souvent règnent parmi eux.

Comme les autres Indiens, les Botocudos tiennent leurs arcs et leurs flèches de la main droite, dans une position verticale, et ils ont également deux espèces de flèches. Les unes, qu'ils emploient principalement à la chasse, sont terminées par un morceau de bambou très-aigu; les autres, qui, à leur extrémité, ont un morceau de bois, leur servent surtout à la guerre, et ils les empoisonnent avec le suc de quelques herbes vénéneuses 2.

Les Botocudos du Jiquitinhonha ne craignent pas, comme on l'a prétendu, ceux que l'on dit être encore

› Comme je vis les Botocudos tirer de l'arc, lorsque j'allai visiter leur chétif aldea, je me réserve de parler plus bas de l'habileté de ces sauvages à lancer des flèches.

2 S'il faut en croire M. le prince de Neuwied, les Botocudos de Belmonte ne connaissent point les flèches empoisonnées. Je me souviens d'avoir vu un jeune Botocudo inviter un Portugais à lui tirer des flèches. Le Botocudo se plaça, à peu de distance, en face du tireur; il voyait la flèche venir et, faisant un mouvement rapide, il la laissait passer. Quand ce jeu eut duré quelque temps, le sauvage voulait absolument que le Portugais prît sa place; mais on pense bien que ce dernier n'y consentit point.

antropophages et auxquels les Portugais font la guerre. Les uns et les autres se rencontrent quelquefois, et ils ne cherchent point à se nuire. Les Botocudos des autres parties de la province racontent aux tribus de Minas Novas le mal que leur font les blancs, et ces dernières en ont conclu qu'il y avait deux espèces de Portugais, les bons, qu'ils connaissent, et les méchans qui habitent les autres divisions.

Les seuls amusemens des Botocudos sont la danse et la musique. Ils chantent souvent; mais ils jouent rarement des instrumens. Ceux qui sont en usage parmi eux sont de petites flûtes faites avec des morceaux de bambous, et une espèce de birimbao qui diffère à peine de celui des nègres, mais qu'ils n'ont sans doute pas emprunté de ceux-ci, car il leur était déjà connu, quand Julião arriva à S. Miguel. Leurs chansons sont aussi barbares que leurs moeurs. L'une n'est qu'un catalogue de mots qui n'ont entre eux aucuns rapports. Je vais donner la traduction de trois autres qui, comme on le verra, n'ont pas beaucoup plus de sens. PREMIÈRE. Le soleil se lève; vieille, mets quelque chose dans ton pot, pour que je puisse manger et que j'aille à la chasse. DEUXIÈME. Botocudos, allons tuer des oiseaux, tuer des cochons, tuer des tapirs, des cerfs, des canards, des zabelés, des hocos, des singes, des macucos2, des serpens, des poissons, des trairas, des piaus

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Espèce de tinamou, qui sans doute est le tinamus noctivagus.

Grande espèce de tinamou dont j'ai déjà parlé vol. I,

P. 32.

(deux espèces de poissons). TROISIÈME. Botocudos, les blancs sont en fureur; la colère est grande; partons vite; femme, prends la flèche; allons tuer des Botocudos. On voit que ces sauvages, ainsi que les Macunís n'ont rien dans leur poésie de cette élévation que l'on s'est plu à attribuer aux Américains indigènes. Les Indiens des livres sont des êtres de raison comme certains personnages de nos comédies. Je n'ai vu dans les véritables Indiens que des infortunés, tout entiers au présent, uniquement occupés de leurs besoins physiques, fort inférieurs à nous et dignes par cela même de toute notre compassion'.

Considérer les nations indiennes comme étant dans l'enfance de la civilisation, c'est une source d'erreurs qui leur seront toujours nuisibles, parce qu'elles empêcheront qu'on ne gouverne ces nations comme elles doivent l'être. Les Américains indigènes, il faut le répéter dans leur propre intérêt, ne sont point susceptibles de cette haute civilisation à laquelle il a été donné à la race caucasique de pouvoir atteindre. Voici comment s'exprime un voyageur sur les Indiens des ÉtatsUnis : « On observe parmi cux une indolence qui les empêche « de travailler, et leur inspire le mépris le plus profond pour « la culture; une impatience qui leur fait dédaigner le repos « d'une vie sédentaire et tranquille, et les entraîne dans les « chasses les plus éloignées et les plus fatigantes, ainsi qu'à « la guerre. Ils portent sur leur physionomie l'empreinte « d'un esprit vide ou enclin à la tristesse...........; ils ont tous « au même degré l'insouciance et l'imprévoyance pour l'avenir, et, malgré l'expérience des disettes annuelles auxquelles cette funeste disposition les expose, ils n'en devien"nent ni plus sages ni plus prévoyants..... Se pourrait-il done

Excepté les serpens, les Botocudos mangent toutes les espèces d'animaux; ils ne dédaignent pas même les crapauds et les lézards. Tantôt ils font rôtir leurs viandes, et tantôt ils les font bouillir dans les pots fabriqués par leurs femmes 1.

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« que, différente de celle des autres hommes, leur imagina«tion se refusât invinciblement à la contemplation de l'avenir, et que, comme les animaux, ils fussent destinés à «ne composer leur vie que du moment présent? La nature «<leur aurait-elle refusé l'étendue de compréhension né«< cessaire pour apercevoir l'utilité des choses nouvelles? Se«rait-il préordonné que jamais ils ne connaîtront la civi«lisation et les lois? Cela est très-probable.» (Voyage dans la Haute-Pensylvanie, tom. I, p. 8, 9 et 353.)

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« Les Tapuyas, dit M. de Neuwied, ont appris des Européens l'usage du sel, et l'on m'a assuré au Brésil que <«< cet assaisonnement avait beaucoup diminué le nombre des indigènes. Azara pense que les Indiens qui n'emploient pas le sel, y suppléent par d'autres alimens salés, par exemple, par le barro ou glaise salée qu'ils mangent abon« damment. Mais la glaise du Brésil n'a pas le même goût salin, et je n'ai rencontré, chez les habitans indigènes de « ce pays, aucun mets salé. » Il est possible que, sur le littoral, il n'existe pas de terrains imprégnés de sel ou de salpêtre; mais ces terrains, appelés barreiros, ne sont point rares dans la province des Mines, et l'on m'a dit positivement à Passanha, que les Botocudos de ce pays assaisonnaient leurs alimens avec de la terre salpêtrée. On m'a aussi assuré à Passanha, que les plantes amères étaient celles que préféraient ces sauvages, et que les Portugais avaient inutilement essayé de manger les mêmes plantes.

Comme les Indiens de Passanha et ceux d'Alto dos Bois, les Botocudos mangent la larve qui se trouve dans les tiges des bambous; mais il paraît qu'ils ne connaissent point l'usage que font les Malalís de cette larve desséchée. Les Botocudos ont aussi coutume de couper une espèce d'arbre dont le bois est fort tendre (probablement le chorisia ventricosa); le tronc pourrit ; une certaine mouche y dépose ses œufs, et les sauvages mangent les larves auxquelles ces oeufs donnent naissance.

Lorsque j'arrivai à S. Miguel, une partie de la troupe de Joahima avait été manger des cocos dans les montagnes. Le jour même, j'allai rendre visite à ceux qui étaient restés, et je retournai les voir le surlendemain. J'entrai dans la maison du capitaine où étaient quelques giraos hauts d'un pied à un pied et demi, et où je ne vis d'ailleurs d'autres ustensiles de ménage que quelques poteries. Près de la maison de Joahima, en était un autre qui avait à peine la hauteur d'un homme, et où une famille était entassée. Le reste de la troupe couchait sous une de ces cahuttes que ces sauvages ont coutume de construire dans les forêts. Celle-ci était à peine haute de trois pieds; elle n'avait point la forme régulière d'un berceau, et les branchages dont elle était couverte avaient été jetés sans ordre sur les bâtons courbés qui formaient sa charpente.

A mon arrivée à S. Miguel, j'avais témoigné au commandant le désir d'emmener avec moi un jeune Botocudo. Plusieurs fois il avait fait part de ce désir au capitaine Joahima; mais celui-ci s'était constamment

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