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une extrême répugnance. En général, c'est rarement en vain qu'un blanc sollicite la grâce d'un esclave', patronage bienfaisant qui montre tout à la fois combien sont douces les mœurs des habitans du Brésil, et combien ils ont d'estime pour la couleur blanche.

Mais ce n'est pas à ce qui concerne les esclaves que se borne le pouvoir des sollicitations. Le desservant de Sucuriú m'avait prié de m'intéresser auprès du commandant Julião en faveur d'un soldat qui désirait obtenir son congé. J'en parlai très légèrement au commandant, et, sans la moindre difficulté, il m'accorda ma demande. Ce serait dans ce pays une trèsgrande impolitesse de refuser à un homme qui jouit de quelque considération, une grâce qu'il demande pour autrui; mais si cette molle condescendance a pour principe un sentiment honnête, il n'en est pas moins vrai qu'elle fait violer sans cesse les lois et la justice 2.

C'est uniquement à Porto Alegre, dans la province de Rio Grande, que j'ai essuyé un refus de ce genre

• Ces sollicitations irrésistibles se nomment en portugais empenho, mot qui n'a pas d'analogue en français. « En ce « pays, dit d'Eschwege, les empenhos ont, dans toutes les "affaires possibles, plus de pouvoir que la raison et les lois. » (Bras. Neue Welt. I, p. 14). — OBS. Je dois beaucoup regretter de n'avoir pas reçu, avant l'impression du premier volume de ma Relation, l'intéressant ouvrage que je viens de citer. Si cet ouvrage m'était parvenu plus tôt, on n'aurait point trouvé, dans mon premier volume, quelques remarques qui ne tombent que sur des fautes d'impression, relevées par

Avant mon départ de la fazenda de M. Vieira dos Santos, on me montra une plante purgative que l'on appelle gonú, et dont on fait un très-grand usage, principalement dans les fièvres malignes (malinas). Ce remède est d'une amertume extrêmement désagréable, et il faut l'employer avec précaution, car sans cela il pourrait causer de fâcheux accidens. On donne le nom de racine à la partie dont on fait usage, mais ce n'est autre chose qu'un renflement conique et allongé du bas de la tige, La partie supérieure de ce renflement se montre hors de la terre; la partie inférieure y est enfoncée, et c'est d'elle que naissent les fibres radicales. Cette espèce de tubérosité contient un suc propre, jaune, qui peut-être s'emploierait avec succès dans la peinture. Le gonú croît dans les catingas, et était, lors de mon voyage, entièrement dépouillé de ses feuilles. Cependant, comme on me dit à S. Rita qu'elles étaient trilobées, je soupçonnai que la plante, qui est une liane, appartenait aux cucurbitacées. Plus tard, une dame de Villa do Fanado qui s'occupait un peu de médecine, me confirma encore dans cette conjecture, en m'assurant qu'il y avait identité entre le gonú et l'anna pinta, ou capitão do mato des Geraes, espèce que j'avais étudiée, et qui bien certainement appartient à la famille des courges '.

M. d'Eschwege lui-même dans son nouveau livre. Qui plus que moi doit avoir de l'indulgence pour les fautes d'impression!

Dans le Serro do Frio, on a fait un très-grand usage de l'anna pinta comme purgatif; mais actuellement ce remède

Le jour que je quittai S. Rita, j'arrivai, comme je l'ai dit, à S. Domingos. Ce village est bâti au-dessus du ruisseau appelé Ribeirão de S. Domingos, et s'élève sur le sommet d'un morne, dominé de tous les côtés par d'autres mornes couverts de bois. Quelques rues de peu d'étendue et une très - grande place qui forme un carré long, composent tout ce village. L'église où le service divin se célèbre aujourd'hui est très-petite et mal ornée; mais on en construit une autre qui conviendra mieux à la population actuelle. Les maisons sont propres, couvertes en tuiles, et construites les unes avec des adobes, les autres avec de la terre et des perches croisées (pao a pique).

S. Domingos fut fondé, en 1728 ', par des aventu

est abandonné. Lorsque j'étais à Tijuco, je devins possesseur d'un échantillon, que je puis considérer comme authentique; car il avait été donné par le fils de la nommée ANNA PINTA, à laquelle on était redevable de la connaissance de la plante, ou du moins de ses propriétés. La fleur est blanche, le fruit ovoïde et à dix stries. L'ovaire est intérieurement traversé par une seule lame dont les bords s'étendent jusqu'au péricarpe; ces mêmes bords se bifurquent; chaque bifurcation, se recourbant à droite et à gauche, porte six ovules, et chaque ovale a dans la pulpe sa logette particulière. Le fils d'Anna Pinta assurait qu'il y avait une saison où la plante cesse d'être amère et où les bestiaux la mangent. On la dit encore bonne contre les maladies vénériennes. Il peut se faire qu'elle forme un genre particulier, et, dans ce cas, je proposerais de l'appeler pintea.

1 Date empruntée à Jozé de Souza Azevedo Pizarro e Araujo.

riers, qui trouvèrent de l'or dans le lit du Ribeirão de S. Domingos, et sur la pente de quelques mornes voisins. Leurs succès n'eurent pas une longue durée, et ce lieu fut abandonné presque entièrement comme l'ont été tant d'autres. Cependant, un particulier de Bahia ayant annoncé qu'il prendrait à 4,000 reis tout le coton qu'on lui présenterait, quelques colons pensèrent que, si cette culture prospérait dans le canton, ils pourraient, au prix offert, être dédommagés de leur travail. La réussite la plus complète couronna leur tentative les cotonniers produisirent en abondance une laine de la meilleure qualité. Attirés par le succès des premiers colons, d'autres arrivèrent bientôt; les environs de S. Domingos se peuplèrent; le village fut rebâti, et, il y a peu de temps, on l'érigea en cheflieu de paroisse1. On ne montre pas sans un certain orgueil une maison qui, actuellement la plus petite de tout le village, en était la plus grande, et portait le nom de casa grande, avant que la culture des cotonniers se fût introduite dans le pays, ce qui date à peu près de l'année 1808.

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C'est cette culture qui fait vivre aujourd'hui les habitans de S. Domingos, et ce lieu peut même être considéré comme le centre du commerce des cotons dans le termo de Minas Novas. Avec le coton, on fabrique à

L'auteur des Memorias historicas dit, vol. VIII, p. 2da, p. 174, que ce fut par un décret du 23 mars 1813, et que cette paroisse, qui auparavant dépendait de celle d'Agua Suja, comprend aujourd'hui Tocoyos et N. S. Mai dos Homens.

S. Domingos des couvertures, des hamacs, de grosses toiles, et même quelquefois des nappes et des serviettes assez fines. Comme à Chapada, il n'existe à S. Domingos aucune manufacture; mais les particuliers font dans leurs propres maisons les différens tissus. On voit dans ce village plusieurs boutiques, et elles sont même assez bien garnies.

Pendant que j'étais à S. Domingos, on y célébra les fêtes qui, dans tout le Brésil, se font à la Pentecôte, mais que les habitans du canton avaient remises cette année-là au jour de la Saint-Jean.

La veille de ce jour on alluma des feux dans toutes les rues, ét il y eut une illumination telle assurément qu'on n'en fit jamais de semblable dans nos villages de France. Tout autour de l'église qui est bâtie isolément sur la place publique, on avait formé une allée de deux rangées de lampions placés sur des bâtons de la hauteur d'un homme. Enfin on tira un feu d'artifice qui avait été fait sur les lieux mêmes, et, si les pièces n'en étaient pas très variées, du moins elles étaient assez belles.

Le lendemain, le commandant du village, chez lequel j'étais logé, me demanda si je voulais accompagner l'Empereur. J'ignorais entièrement quelle était cette cérémonie; mais comme je vis qu'on voulait me faire un honneur, je crus ne pouvoir refuser. Après m'être habillé, je me rendis avec le commandant à la maison de celui qui, cette année-là, jouait le rôle de l'Empereur. Un grand nombre de personnes étaient rassemblées devant la porte, et il n'y avait pas moins de monde dans la première pièce où nous entrâmes. Là

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