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ait retiré quelque profit, et il est obligé d'abandonner ce qu'il possède, quand le moment de payer arrive. Dans chaque village il existe ordinairement un homme riche, qui vend ainsi à crédit des marchandises à tous ses voisins, et qui les met par là dans une entière dépendance. L'acheteur peu aisé n'ose rien refuser à celui qui est, pour ainsi dire, devenu l'arbitre du sort de sa famille,et cette domination est d'autant plus fâcheuse que celui qui l'exerce est trop souvent un aventurier, sans éducation, qui s'est enrichi par des moyens honteux.

Il ne faut pas croire, au reste, que l'usage d'accorder de longs crédits soit particulier au termo de Minas Novas. Parmi les premiers habitans de la province des Mines, il dut y avoir un grand nombre d'aventuriers sans fortune. Lors de la découverte, l'or était si commun dans les environs de Villa Rica et ailleurs, qu'avec un travail facile on était assuré de pouvoir s'enrichir en peu de temps. Les mineurs qui avaient déjà travaillé et qui possédaient quelque chose, ne devaient donc faire aucune difficulté de vendre à des termes trèséloignés aux nouveaux venus ou à ceux que quelques circonstances avaient rendus moins heureux, sachant bien que les débiteurs ne pouvaient rien faire perdre à leurs créanciers. Telle est probablement l'origine des longs termes que l'on accorde aux acheteurs dans la province des Mines. Cependant il n'est pas impossible que le discrédit dans lequel était tombé, lors de mon voyage, le papier-monnaie appelé bilhetes d'estracção real, ait amené un changement favorable. Le peu confiance qu'on avait dans les billets, et la crainte

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d'être un jour forcé de les recevoir, faisait qu'à Tijuco, Villa do Principe, etc., on vendait déjà beaucoup moins à crédit, et il est à espérer que l'on aura fini par renoncer à l'ancienne habitude.

Pendant que j'étais absent de Villa do Fanado, on y avait, comme à Villa do Principe, célébré la fête du couronnement du roi1. On avait élevé un théâtre, fait des costumes, joué des opéras et donné des tournois (cavalhadas). Chacun, suivant ses moyens, avait contribué aux dépenses, et il n'en avait pas coûté un denier à l'administration. Les paroles et la musique des opéras avaient été composées dans la ville même; mais en ce pays il n'est point extraordinaire de trouver des compositeurs de musique ; et le moindre village a les

La reine Marie Ire mourut le 16 mars 1816; mais le roi Jean VI ne fut couronné à Rio de Janeiro que beaucoup plus tard. On a dit, prétend un voyageur, que le roi ne voulut point être couronné jusqu'à ce que les prêtres eussent déclaré que sa mère était sortie du purgatoire. « Sur ce

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point, ajoute le même voyageur, les ecclésiastiques ne fu<< rent malheureusement point d'accord; car ceux de la chapelle royale assurèrent que la princesse jouissait de la béa«<titude céleste, tandis que ceux de la Candelaria soutinrent «chaudement qu'elle n'était point encore purifiée. » Je n'ai jamais entendu parler de telles extravagances, et je ne conçois pas que l'on ait pu s'amuser à les imprimer. Celui à qui le public en est redevable n'était cependant dépourvu ni de sens, ni d'esprit; mais comme il était sourd, m'a-t-on dit, et qu'il ne savait point le portugais, il aurait dû se défier davantage de ce qu'il croyait entendre.

siens qui s'exercent principalement sur des messes et sur des hymnes pour les fêtes solennelles et celles des patrons.

Sous le nom de danber on m'avait beaucoup vanté une certaine résine purgative; mais on ne m'avait pas fait connaître à quel végétal elle était due. Pendant que j'étais à Villa do Fanado je crus découvrir ce petit secret. Une dame de cette ville, qui s'occupait de médecine domestique, me cita une plante très-connue dans le pays, et dont les racines, assure-t-on, fournissent une substance résineuse et purgative aussi efficace que le mercure pour la guérison des maladies vénériennes. Comme cette dame ajouta que la plante portait le nom de dambré, je ne doutai pas que ce ne fût elle qui fournissait ce mystérieux danber, dont on m'avait tant fait l'éloge. La même dame m'envoya un pied de dambré muni de ses racines; il n'avait malheureusement ni fleurs ni fruits; cependant je crus reconnaître que la plante appartenait à la famille des rubiacées. La racine est grosse comme le petit doigt, elle a l'odeur de l'anthoxanthum odoratum, et son goût est celui de la même plante avec un mélange d'amertume. Les tiges grêles qu'elle produit sont ordinairement droites; mais elles tombent sur la terre quand elles s'élèvent à plus de deux ou trois pieds. Peut-être, au reste, le dambré est-il identique avec la rubiacée que l'on appelle ailleurs raiz de frade, et que je considère comme un chiococca. On voit que j'ai aussi eu à me plaindre de cette espèce de fatalité qui, comme le dit M. de Humboldt, semble s'opposer à ce que les voya

geurs puissent reconnaître avec certitude les végétaux les plus utiles, tandis qu'ils accumulent dans les herbiers une foule d'espèces qui ne servent qu'à alimenter la curiosité des botanistes.

Après avoir passé quatre jours à Villa do Fanado, je partis de cette ville le 8 juillet 1817. Le juiz de fóra m'avait encore reçu dans sa maison, et j'avais été comblé par lui et par son ami São Payo de nouvelles marques d'attention et d'amitié. J'étais attendri en me séparant de ces deux hommes recommandables; en général, il m'était impossible de m'accoutumer à l'idée de ne plus revoir ceux qui m'avaient si bien accueilli; et où n'étais-je pas reçu de la manière la plus aimable!

CHAPITRE XI.

ROUTE DE VILLA DO FANADO au sertão par PIEDADE, ARASSUAHY ET LES FORGES DE BOM FIM.

Idée générale du pays que traverse l'auteur après avoir quitté Villa do Fanado. — Village de Piedade; sa situation; ses rues, ses maisons; son histoire; productions. Vareda. - Exposition de la tête et des mains de deux meurtriers. - Fazenda de Culão. Rivière d'Itamarandiba. Parí, espèce de piége pour prendre le poisson. - Singulière végétation des queimadas.—Orangers du Brésil. Manière de manger et de peler les oranges. Encore quelques mots sur Firmiano.-Village d'Arassuahy. Forges de Bom Fim. Fazenda de Exemple de gaspillage. Roça do Contrato. Gallinacées qu'on devrait tâcher d'accoutumer à la domesticité. Barbados. Courtes réflexions sur les nègres. Pé do Morro. Carrapatos. - Pays charmant. L'auteur Jiquitinhonha et entre dans le Sertão. Il s'égare et couche sur le bord d'un ruisseau.

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De Villa do Fanado je me dirigeai à peu près vers le sud-sud-est, et marchant dans un espace de 26 lieues, parallèlement au cours de l'Arassuahy, je me rendis à S. João, et de là aux forges de Bom Fim. Ce fut le chemin de Villa do Fanado à Villa do Principe que je suivis, du moins en partie, dans le cours de ce voyage '.

Itinéraire approximatif de Villa de Fanado aux forges de Bom Fim:

De Villa do Fanado à Piedade..

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31.

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