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pasteurs qu'ils cathéchisassent les enfans et fissent le dimanche des instructions aux fidèles rassemblés 1.

Une telle réforme serait d'autant plus désirable que, si les Sertanejos croupissent dans l'ignorance, ce sont les circonstances où ils se trouvent qu'il faut en accuser, et non un défaut naturel d'intelligence. Il est surprenant que des hommes qui vivent si loin des villes et qui communiquent si peu les uns avec les autres, aient conservé tant de politesse et un langage aussi pur'. Quelques mois de leçons suffisent très-souvent pour enseigner aux enfans la lecture et l'écriture, et, malgré le peu de modèles que les gens de ce pays ont sous les yeux et l'absence totale de ressources pour apprendre quoi ce soit, quelques-uns montrent une industrie et un goût pour les arts mécaniques qui mériteraient des encouragemens.

Dans le Sertão comme dans les autres parties de la

Le respectable Antonio do Desterro, évêque de Rio de Janeiro, avait ordonné, en 1773, qu'avant la messe paroissiale on fit une lecture instructive d'une demi-heure; la même chose a été plus d'une fois recommandée par D. Jozé Joaquim Justiano de Mascarenhas Castello Branco et par l'évêque actuel; mais les pasteurs ont trop souvent négligé d'exécuter les ordres de ces prélats.

2 Je n'étais dans le Sertão que depuis treize jours lorsque j'écrivais ceci; mais je ne me rappelle pas qu'aucune observation l'ait démenti depuis. Ce que je dis sur l'intelligence des Sertanejos, leur facilité pour apprendre, le goût de plusieurs d'entre eux pour les arts mécaniques, m'a été communiqué par un fonctionnaire qui habitait le pays, sans y être né, et qui peut-être est l'homme le plus éclairé et le plus spirituel que j'y aie rencontré, M. le curé de Contendas."

dans

province des Mines, on ne cultive la terre que les lieux où elle a produit des bois. Cependant les fazendas de ce pays n'ont point nécessairement une existence éphémère, comme celles des Geraes, car les plateaux produiront toujours d'excellentes herbes pour nourrir les bestiaux, et l'on ne voit ni la fougère, ni le capim gordura s'emparer des terrains défrichés. A la vérité, la terre est susceptible de se fatiguer, et quand elle a rapporté un certain nombre de fois, elle ne donne plus autant; mais si alors on la laisse reposer une douzaine d'années, et qu'on laisse aux capoeiras le temps de s'élever et de devenir capoeirões, le sol recommence à produire avec la vigueur qu'il avait eue d'abord. Au reste, les habitans de l'intérieur du Sertão ne plantent guère que pour leur consommation. Un végétal qu'ils cultivent beaucoup, et que l'on ne voit point dans les alentours de Villa Rica, c'est le manioc. A la farine de blé de Turquie, les Sertanejos préfèrent celle de la racine de manioc, parce qu'ils pensent généralement que la première est trop échauffante pour ceux qui habitent un pays aussi brûlant que le leur ; ils assurent que le maïs occasionne chez eux des maladies de peau, telles que la gale, la lèpre et l'éléphantiasis, et ceux même qui ont du maïs en abondance ne l'emploient que pour la nourriture des mulets, des cochons et des poules'.

Les notes qui m'ont servi à tracer ce tableau du Sertão, ont été successivement recueillies en différens endroits de la vaste contrée que je cherche à faire connaître. Je place le contenu de ces notes dans un tableau général, parce qu'elles

On assure qu'il existe de l'or en plusieurs endroits du Sertão, mais on ne l'extrait nulle part '.

Le salpêtre est, pour ce pays, une richesse beaucoup plus réelle. Cette substance se trouve dans une grande partie du Désert, et il est permis indistinctement à tous les particuliers de fouiller des terres salpêtrées quelque part que ce soit. J'ai entendu un riche fazendeiro se plaindre de ce qu'on privait ainsi les colons d'une des productions de leur sol, et de ce qu'on exposait leurs propriétés à des dégradations. A la vérité, ajoutait le même fazendeiro, la loi veut que ceux qui fouillent des terrains salpêtrés indemnisent les colons du tort qu'ils leur causent; mais comme ceux qui s'occupent de ce travail sur les propriétés d'autrui sont presque toujours des gens pauvres, l'indemnité se paie très-rarement. Il existe dans tous les environs du village de Coração de Jesus un grand

sont présentées dans le journal de mon voyage d'une manière générale, et qu'elles ne sont contredites ni par mes souvenirs ni par d'autres notes subséquentes.

M. Martius dit (Reis., p. 510) que les Sertanejos s'occupent quelquefois de la recherche de l'or qui se présente çà et là, et même des diamans; mais ce savant n'a sans doute voulu parler que de l'entrée du Désert dans la direction de S. Domingos et dans le voisinage de l'Itacambiruçú. On sait en effet qu'en 1707 on donna avis au gouvernement de Bahia de l'existence de mines d'or dans le district d'Itacambira (Piz.); on sait aussi qu'il existe des diamans dans la rivière d'Itacambiruçu et dans la Serra de S. Antonio qui en est peu éloigné.

nombre de grottes d'où l'on extrait des terres salpêtrées. Les alentours du village de Formigas ont aussi fourni beaucoup de salpêtre; mais actuellement les salpêtrières de ce canton sont presque épuisées. On reproche au reste à ceux qui tirent les terres salpêtrées des grottes où elles se trouvent, d'avoir mis fiu euxmêmes à ce genre de production, en ne rejetant jamais dans les cavernes les terres qu'ils en ont extraites.

Je profitai de mon séjour à Formigas pour aller voir une grotte d'où l'on tirait du salpêtre, probablement la seule du pays qui, à cette époque, fournissait encore cette substance. Après avoir traversé, dans un espace d'environ une lieue, des catingas absolument semblables à celles de la 7° division, j'arrivai à une maisonnette appelée Lagoinha, dont le maître était le propriétaire de la caverne. On me fit monter dans un de ces chars à bœufs en usage dans le pays, et bientôt j'arrivai à des rochers qui sont disposés par couches horizontales, et forment une espèce de muraille perpendiculaire au sol. Tout-à-fait au-dessous de ces rochers, est l'entrée de la caverne. Avant que les hommes eussent commencé à y travailler, elle avait déjà été creusée par la nature dans un espace d'environ trente pas de longueur sur huit ou dix de large. Lors de mon voyage, il y avait trois ans que l'on tirait des terres salpêtrées de cette caverne, et elle se prolongeait très-avant sous le roc, en formant diverses sinuosités. Je pénétrai jusqu'à l'endroit où étaient parvenus les travailleurs, marchant presque toujours courbé, et allant quelquefois à quatre pattes. Le rocher sert de voûte à cette galerie; partout

la terre est très - fortement salpêtrée; mais d'ailleurs je ne vis rien qui me parût digne d'attention. La posture qu'on est obligé de prendre dans la caverne ne permet pas qu'on tire la terre dans ces grandes sébiles appelées bateas, qui sont en usage dans le pays. On se sert donc de chariots extrêmement petits, qui ressemblent à des jouets d'enfans, et qui sont faits sur le modèle des grands chars à boeufs. Ce qui me parut très-digne de remarque, c'est que les fils du propriétaire de la grotte travaillaient eux-mêmes à l'extraction du salpêtre. Les plus âgés fouillaient la terre et conduisaient le char à boeufs destiné à la transporter; les plus jeunes prenaient cette terre dans des sébiles et la chargeaient dans le char. Les travailleurs se plaignaient beaucoup d'une petite mouche qui les incommodait extrêmement. La caverne était aussi, à ce qu'il paraît, l'asile d'une quantité considérable de très-grandes chauve-souris; mais comme on venait de leur faire la chasse, je n'en aperçus aucune.

Il serait à désirer que quelque géologiste visitât avec soin les grottes du Désert. Il y trouverait probablement des ossemens fossiles, car on m'avait donné à Villa do Fanado une dent de mastodonte, qui est actuellement au muséum de Paris, et qu'on m'avait dit avoir été trouvée dans un terrain salpêtré du Sertão. Je ne sais trop même si l'on ne me parla pas d'ossemens gigantesques découverts dans cette contrée 1.

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Depuis que ce chapitre a été écrit, je vois, par l'ouvrage de MM. Spix et Martius, qu'ils ont rempli le vœu que je

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