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A cette époque, il y avait environ deux mois que Firmiano m'accompagnait; il était fort gai, très-docile, et devenait beaucoup moins paresseux. C'était lui qui séchait le papier que j'employais pour mes plantes, et il commençait à avoir beaucoup de petites attentions. A Contendas il avait très-souvent amusé le curé par ses grâces sauvages; il se couchait sans cérémonie sur le même lit que lui ; il venait régulièrement à l'heure du dîner, et il en mangeait très-gaîment sa

vant, je ne crois pouvoir mieux faire que de traduire ici, sans pourtant les garantir, les détails qui ont été donnés sur ce reptile par deux savans voyageurs. « Au rapport de « M. Nogueira Duarte, disent Spix et Martius, le sucuriú « atteint quelquefois une si grande longueur, qu'on peut « le prendre pour la tige renversée d'un palmier. Il n'a << point de venin; mais il est redoutable par son extrême «< force. Quant il veut attaquer quelque animal, il roule sa << queue autour d'un arbre ou d'un rocher, s'élance rapide« ment sur sa proie, lui broie les os dans ses replis, et l'a« vale lentement par une sorte de succion. De vieux serpens « affamés ont attaqué un cavalier et son cheval ou même des « bœufs, et ont avalé ces derniers animaux jusqu'à leurs « cornes, qui tombaient quand le corps du boeuf était consom« mé... Plusieurs Sertanejos nous ont rapporté qu'ils avaient « trouvé dans l'estomac d'un sucuriú de quarante pieds un chevreuil et deux cochons sauvages... Souvent nous avons << eu l'occasion de voir de ces serpens qui étaient roulés «< comme des câbles sur le bord des lacs. On peut faire, sans

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danger, la chasse à ces animaux, parce qu'ils sont stu

pides, paresseux et craintifs..... C'est pendant l'engour«dissement de plusieurs semaines qui succède à leur repas

part. Le muletier Silva lui montrait à prier; mais malheureusement il lui faisait réciter de si longues formules qu'il était difficile que rien restât dans sa mémoire.

A quelque distance de Tapera, j'entrai dans des catingas absolument semblables à celles de Minas Novas, et j'y retrouvai le barrigudo, l'imburana (bursera leptophloeos, Mart.), et l'imbirassú. J'avais eu trop souvent à me plaindre de l'absence des insectes;

qu'on les attaque avec le plus de sûreté. La chair du su« curiú ne peut se manger, mais on emploie sa graisse dans « différentes maladies, telles que la phthisie.....» (Reis, p. 522.) Le boa dont il s'agit ici est identique avec celui que M. de Humboldt dit avoir vu nager dans l'Orénoque (Tableaux, I, p. 187); cependant M. de Humboldt assure que le boa qu'il a observé entoure sa victime d'une humeur visqueuse, et MM. Spix et Martius n'admettent point ce fait pour ce qui regarde le sucuriú. Ce qui bien certainement doit être rejeté comme une fable, c'est l'existence de ces griffes, à l'aide desquelles des écrivains de diverses nations ont prétendu que le sucuriú se cramponnait avant de se jeter sur sa proie. Quoi qu'il en soit, il est clair que c'est le sucuriú que Casal a appelé sucuriúba, nom que, suivant M. le prince de Neuwied, le reptile qui nous occupe porte réellement à Belmonte. Je ne sais trop si l'on n'a pas confondu quelquefois le sucuriú avec le giboya; mais, d'après M. de Neuwied, il paraît que ce sont deux espèces entièrement différentes, quoique toutes les deux appartiennent également au genre boa. Le serpent dont l'historien français du Brésil a fait une description romanesque sous le nom de liboïa (Alphonse de Beauchamp, Histoire du Brésil, t. I, p. 76), n'est évidemment autre chose que le sucuriú des Mineiros.

mais dans les campos qui succédèrent aux catingas dont je viens de parler, et qui avaient aussi peu de feuilles qu'elles, je vis de grandes sauterelles vertes et bleues qui s'élançaient par troupes nombreuses d'un arbre à un autre.

A environ deux ou trois lieues de la fazenda appelée Capão do Cleto, je descendis par une pente rapide dans une vaste plaine. La chaleur devint plus forte encore que les jours précédens; le ciel n'offrait plus cette teinte pure et brillante que j'avais admirée tant de fois, mais il était chargé de vapeurs rougeâtres. Près d'un retiro, situé à une demi-lieue de Capão, la végétation changea tout à coup; la terre, crevassée, était encore d'une extrême sécheresse, mais il était évident qu'elle avait été naguère couverte d'eau; deux plantes épineuses, que je n'avais rencontrées nulle part, formaient çà et là de larges buissons : l'une me parut identique avec cette mimose à fleurs jaunes et odoriférantes, que l'on cultive à Rio de Janeiro sous le nom d'esponjeira'; l'autre était une espèce de bauhinia à très-petites feuilles et à fleurs verdâtres (bauhinia inundata, N.2). Ces végétaux n'avaient point perdu leur verdure comme les arbres des catingas, et la mimose offrait une multitude de fleurs dorées au milieu de son feuillage d'un vert obscur. Quelques es

* Acacia farnesiana.

2 Son nom vulgaire est unha de gato. M. Martius, peutètre avec raison, croit cette espèce distincte des bauhinia, et l'appelle perlebia bauhinioïdes.

pèces de petits oiseaux qui jusqu'alors ne s'étaient point offerts à mes regards, voltigeaient sur les arbrisseaux. Tout annonçait l'influence d'une cause que je ne découvrais point encore enfin j'arrivai à l'habitation de Capão do Cleto sur le bord du Rio de S. Francisco, et je reconnus que les changemens qui venaient de me frapper étaient dus au voisinage du fleuve.

CHAPITRE XIV.

LE RIO DE S. FRANCISCO.

Le Rio de S. Francisco; sa source; son embouchure; lieux situés sur ses bords entre Salgado et la mer; ses inondations périodiques; maladies qu'elles causent; histoire du cours de l'année sur les bords du S. Francisco; les piranhas (poisson diable); poisson sec du Rio de S. Francisco. — Histoire des premiers établissemens qui se firent dans les environs de Capão do Cleto. Courtes Réflexions sur le croisement des Indiens avec les autres races. - -Lacs voisins du S. Francisco; description d'un de ces lacs.

Le Rio de S. Francisco doit son origine à la magnifique cascade appelée Cachoeira da Casca d'Anta (la cascade de l'arbre connu sous le nom de casca d'anta, le drymis granatensis des botanistes), qui tombe environ par le 20° 40′ de la Serra da Canastra, montagne située dans la partie orientale de la comarca du Rio das Mortes'. Tant qu'il coule dans

1 Je décrirai dans mon troisième Voyage la cascade da Casca d'Anta, dont aucun ouvrage, à ma connaissance, n'a parlé jusqu'ici. J'ai vu cette cascade tomber de la montagne; mais je dois convenir que je n'ai pas observé le point où ses eaux s'échappent de la terre. C'est, au reste, de nos jours seulement que l'on a commencé à avoir des idées un peu précises sur les sources du S. Francisco. Autrefois, dit l'historien du Brésil, on croyait généralement que le S. Fran

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