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ment lorsqu'elle venait à se détacher qu'ils montraient quelque honte. Ces sauvages se rendirent à Villa do Fanado, et là il leur fut donné des habillemens et des instrumens de fer. Du chef-lieu du termo, ils revinrent à Alto dos Bois, et ils s'établirent sur le bord d'un ruisseau, dans un fond couvert de bois, à une demilieue de l'aldea actuel. Cependant les Malalís se séparèrent des Macunís, et ceux-ci restèrent seuls ; mais cédant à leur tour à l'inconstance naturelle aux Indiens, ils se retirèrent à S. Antonio do Ferro, et ils ne revinrent plus qu'au bout de quelques années.

Jusqu'au moment où fut établi le poste militaire de Passanha, les Botocudos n'avaient point encore paru dans les environs d'Alto dos Bois; mais, poursuivis par les soldats de la 5° division (celle de Passanha), ils refluèrent vers les Minas Novas, ravagèrent des champs de maïs, et tuèrent quelques habitans. Les Portugais et les Indiens quittèrent les bois; ils se retirèrent, en 1809, sur le plateau où est aujourd'hui l'aldea, et là ils n'eurent plus à redouter les Botocudos, qui n'attaquent jamais de front un ennemi armé et un peu nombreux. En 1814, on donna plus de force à cette petite colonie, en envoyant pour la protéger un détachement de trente hommes, et l'on mit à leur tête le fourrier João de Magalhães, dont j'ai parlé plus haut.

Cependant, dès l'origine, les Portugais avaient songé à la civilisation des Macunís; le cultivateur ANTONIO GOMES, auprès de la fazenda duquel ils s'étaient établis d'abord, et qui ensuite s'est retiré avec eux sur le plateau actuel, s'était beaucoup occupé

de ces Indiens. Le capitão mór du district lui donna sur eux toute autorité, et depuis il fut chargé spécialement par la junte de Villa Rica de travailler à leur civilisation, de leur enseigner la doctrine chrétienne, et d'en faire des hommes utiles. Sans aucun intérêt, Antonio Gomes remplit dignement la tâche qui lui a été assignée. Revêtu par la junte du titre de directeur, il conduit les Indiens avec bonté; il se fait aimer d'eux; il les instruit dans notre religion, et apprend aux jeunes gens à lire, à écrire et à compter.

Les Macunís ne diffèrent point, par leurs traits, des autres hommes de leur race. Ils ont également les cheveux noirs, bien fournis, plats et rudes, la tête grosse, l'os des joues proéminent, le nez épaté, la poitrine et les épaules larges, les pieds petits, les jambes et les cuisses menues. Leur peau, comme celle des autres Indiens, est d'une couleur jaune; mais elle prend une teinte cuivrée quand ils restent sans vêtement. Les femmes des Macunís marchent très-mal, et ont aussi peu de grâce que toutes les autres Indiennes. Quant à leur figure, elle est agréable, et le rire leur prête encore des charmes.

Une douzaine de ces femmes vinrent un jour me voir travailler. Elles avaient de la gaîté; leur regard était hardi, et elles ne montraient pas la moindre timidité. Parmi elles était l'Indienne la plus vieille de l'aldea, Indienne dont j'avais déjà reçu la visite le jour de mon arrivée. Une jupe de coton sale, passée en bandoulière par-dessus l'une de ses deux épaules, et attachée à son cou, formait tout son vêtement. Ses

cheveux extrêmement touffus se redressaient sur sa tête; sa peau était d'un bistre obscur; son corps était courbé, et celle de ses mamelles qui restait découverte battait sa poitrine à mesure qu'elle marchait. Cependant on s'accoutumait bientôt aux traits hideux de cette femme, parce qu'elle avait toujours le rire sur les lèvres, et que, malgré son indigence, elle portait le contentement empreint sur sa physionomie. Son mari vivait encore: on ne pouvait savoir son âge; mais il est vraisemblable qu'il avait beaucoup plus de cent ans; il paraissait, disait-on, tout aussi vieux, lorsque les Macunís étaient arrivés pour la première fois parmi les Portugais; il donnait le nom d'enfans aux hommes les plus âgés de l'aldea, et, comme il semblait vigoureusement constitué, il aurait sans doute vécu long-temps encore, si un ulcère vénérien n'eût rongé sa figure.

La langue des Macunís se prononce de la même manière que celle des Coroados, des Malalís et des Monoxós; c'est-à-dire que les Indiens d'Alto dos Bois tirent également les sons de leur gorge et parlent la bouche presque fermée. Le macuní n'a aucune ressemblance avec l'idiome des Malalís, mais il en a beaucoup avec celui des Monoxós; cependant il m'a paru plus adouci que ce dernier, et ainsi le ch des Monoxós devient souvent un s dans le langage des Macunís. Ce langage admet des mots composés, et, dans ces mots, comme dans l'allemand, le génitif se combine avec le substantif qui le régit. Le vocabulaire suivant pourra donner quelque idée du macuní. —

Dieu; Tupá.-Ciel; betcoi.-Etoiles; sai (l's se prononce un peu comme le th des Anglais).-Église; tupabén.—Nuage; autché?.—Tonnerre, teoptatinán. -Pluie; té.-Jour; aptioité.-Nuit; aptama. Midi; apucaaiinhaicalénhiacubapa (soleil au milieu du ciel). Soleil; apucaai.— Terre ; haám.―Feu; keu (prononciation française). Eau; conahan. - Homme; etpór.

Minuit; cubatete.

Femme; ati. Femmes (au pluriel); conhan. Enfant du sexe masculin; etcoló. - Enfans (au pluriel) du sexe féminin; atinán. Père; tatán.

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Mère; hahaim. Epouse; sasérité. - Tête; himpotoi. -OEil; cáai. —Nez; enisikeu (keu prononciation française). - Bouche; nicoi. — Dent; itsioi. -Gosier, itcatecai. - Bras; nhim. Doigt; nhimcotó.- Main; nhimanacoi, -Sauce; tepi. - Poisson; mám. -Grand poisson; mam psié (psié forme une seule syllabe, et l'on glisse légèrement sur l'i). -Chemise; topitchai. - Hache; pim. - Puce pénétrante; haminhan.-Couleuvre; canhá. - Miel; paug (prononciation extrêmement sourde) 1.

Lorsque les Macunís vinrent pour la première fois s'établir au milieu des Portugais, des maladies causées sans doute par les changemens qui s'opérèrent dans leur manière de vivre, en firent périr un grand nombre ; mais actuellement qu'ils ont pris l'habitude d'autres mœurs, ils ne sont pas sujets à plus de maladies que

Je suis encore ici l'orthographe portugaise. L'h est aspiré; á a la prononciation française.

les habitans blancs ou mulâtres de ce canton. Ils n'étaient même que soixante, quand ils revinrent pour la seconde fois à Alto dos Bois, et ils sont aujourd'hui plus de cent.

On les a tous baptisés; ils connaissent les principes de la religion chrétienne, et le matin ainsi que le soir, on les entend, dans l'intérieur de leurs maisons, réciter des prières en langue portugaise.

La religion cependant a fort peu amélioré leurs mœurs. La plupart ont été mariés par un prêtre; mais ils n'ont aucun respect pour la fidélité conjugale. Pour le plus petit présent, les maris laissent partager leurs droits; les femmes de leur côté cèdent aux moindres sollicitations, et souvent même elles font toutes les avances. Elles ont surtout un goût très-vif pour les nègres, et, lors de mon voyage, une Indienne élevait un métis, fruit de ses amours passagères pour un nègre fort vieux, qui était venu faire des habits dans l'aldea. En général les Macunís sont tous très-portés aux jouissances de l'amour.Les prêtres refusent de marier les filles avant l'âge de douze ans ; mais, dès celui de huit ou neuf, long-temps avant qu'elles soient formées, les parens les livrent, pour quelques légers cadeaux, à des hommes faits, qui leur donnent le titre d'épouse. J'ai vu une petite fille de huit ans qui était déjà mariée de cette manière.

Malgré les instructions qu'ils reçoivent, les Macunís ont aussi conservé un très-grand penchant pour le vol, et ce sont ordinairement les femmes qui sont chargées de commettre les larcins. Le commandant a

TOME II.

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