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Me dirigeant vers le village de Chapada, je passai le ruisseau de Bom Successo, et après avoir traversé des carrasqueinos, j'arrivai sur des terrains pierreux couverts d'arbres à tige tortueuse.

Sur ce chemin, qui est assez difficile, on trouve deux maisons, dont l'une s'appelle Bandeira Pequeina et l'autre Bandeira Grande. Les noms de Bandeira et Bandeirinha sont très-communs dans la province des Mines, et voici quelle en est l'origine. Lorsque les aventuriers paulistes allaient à la recherche de l'or, et s'enfonçaient dans les bois pour faire des esclaves parmi les Indiens, ils se réunissaient en troupes plus ou moins nombreuses, commandées par l'un d'eux, qu'on appellait capitaine. Ces troupes portaient en portugais le nom de Bandeira', et ce nom a été appliqué aux lieux où elles s'arrêtèrent.

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De Sucuriú à Setuba, environ.

Boa Vista da Barra do Calhão, en

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81.

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Bandeiras são no Brasil e Minas, associações de homens,

Chapada, où j'arrivai bientôt, est situé sur la crête d'un morne allongé, qui s'étend à peu près de l'orient à l'occident, et est dominé de tous les côtés par d'autres mornes. Ces derniers semblent former un cercle autour du village; la plupart sont couverts de carrasqueinos; mais celui qui s'élève du côté du nord-est, déchiré, bouleversé par les chercheurs d'or, n'offre pas même d'humbles arbrisseaux. Entre ce morne, appelé Batata, et celui sur lequel est bâti le village, coule, à peu près de l'est à l'ouest, le ruisseau de Capivarhy ou Capibary', qui finit par se jeter dans l'Arassuahy.

Sur le milieu de la crête où est bâti Chapada, les maisons sont plus nombreuses; au groupe qu'elles forment se rattachent deux longues rues qui se dirigent, l'une vers l'est, l'autre vers l'ouest, et le village, dans son ensemble, présente à peu près un triangle, dont deux angles seraient très-aigus.

Au milieu du groupe de maisons qui forme le centre du village, est une place à peu près triangulaire.

que vão pelos sertões de baixo de um cabeça, descobrir terras mineiras. D'antes chamavão assim os que hião descobrir Indios gentios, e conduzi-los, ou cativa-los, resgata-los. (Moraes, Dic., I, p. 371.)

• On prétend, dans le pays, que ce ruisseau doit son nom à la grande quantité de capivaras ou capibaras (cabiais) que les Paulistes trouvèrent sur ses bords, et l'on fait dériver ce nom du mot capivara et du mot portugais ahí (ici). Il me paraît plus vraisemblable que capivarhy est formé de capibara et du terme indien y’g (eau), rivière des capivaras ou cabiais. 6

TOME II.

C'est là que l'on voit l'église paroissiale; elle est isolée comme toutes celles des villes et des villages; mais elle n'occupe pas le milieu de la place. Outre cette église il en existe encore une autre qui appartient aux nègres, et qui, suivant la coutume, est dédiée à Notre-Dame du Rosaire, dont l'image est toujours noire.

J'ai dit qu'aucun ordre monastique ne pouvait s'établir dans la province des Mines; cependant il existe dans plusieurs parties de cette province des maisons, où des femmes se réunissent pour vivre sous une règle commune. On leur donne le nom de freiras, qui est celui des véritables religieuses; mais elles ne peuvent être considérées comme telles, puisqu'elles ne sont liées par aucun vou. Un missionnaire a formé à Chapada une réunion de ce genre. Quoique parfaitement libres, les femmes qui la composent ont eu besoin de l'autorisation du roi pour rester ensemble. Ayant très-peu de bien, ces recluses reçoivent des aumônes. Elles portent l'habit des carmélites; elles suivent la règle de sainte Thérèse, et je leur ai entendu chanter, pendant la messe, des hymnes en langue vulgaire, ce qui ne se pratique point ailleurs. Il est à croire, au reste, que la maison des recluses de Chapada ne subsistera pas long-temps; car ces femmes sont toutes vieilles, et aucun sujet ne se présente pour remplacer.

les

On compte à Chapada environ cent soixante maisons. A l'exception d'une seule, toutes n'ont que le rez-dechaussée; elles sont basses, couvertes en tuiles et construites de la même manière que celles de Villa do

Fanado. Les fenêtres sont peu nombreuses, à peu près carrées, et fermées, pour la plupart, avec des volets peints en rouge.

Le village de Chapada se trouve bâti à l'extrémité orientale du territoire de la paroisse dont il est le chef-lieu, et ce territoire s'étend comme une langue à vingt lieues vers l'orient. On peut être étonné de rencontrer, dans un pays dont la population est si peu considérable, deux chefs- lieux de paroisse aussi rapprochés que Chapada et Villa do Fanado; mais il faut songer que les aventuriers qui les premiers pénétrèrent dans l'intérieur du Brésil, s'inquiétaient peu de mettre quelque régularité dans leurs établissemens; ils cherchaient de l'or, et, en ayant trouvé beaucoup dans le territoire de Chapada, ils fondèrent ce village.

Chapada ne fournit plus aujourd'hui autant d'or qu'autrefois, et plusieurs des habitans se sont retirés ailleurs. Cependant il y a encore dans le pays quelques lavages très-productifs; l'on peut citer, entre autres, celui de Batata, ce morne dont j'ai parlé plus haut, et qui fait partie de ceux qui entourent ce village. L'or se présente ici tantôt en veine, tantôt épars presque à la surface du sol on en a découvert des morceaux qui pesaient jusqu'à onze livres.

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La population actuelle de Chapada s'élève à environ six cents individus, qui, presque tous, sont mulâtres, et dont plusieurs, s'appliquant à l'agriculture, ne viennent que le dimanche au village. C'est principalement du riz et des haricots que l'on recueille dans ce pays. On n'y cultive point le cotonnier; mais avec

le coton qu'ils achètent, les habitans fabriquent des couvertures qu'ils exportent ou qui se débitent sur les lieux mêmes.

Chapada jouit d'un très - grand avantage, celui d'être situé sur la route des pays où l'on récolte le coton avec le plus d'abondance. Cette bourgade est vivifiée par le passage des caravanes, qui se rendent à Rio de Janeiro, et elle leur offre un lieu de halte trèscommode. Une vaste auberge, bâtie sur la place, reçoit les voyageurs '.

Je logeai à Chapada chez le pasteur du village, dont je reçus le meilleur accueil. C'était sans doute un grand avantage pour moi de pouvoir jouir de la société intime des hommes les plus honnêtes et les plus éclairés des pays que je parcourais. Mais il n'en est pas moins vrai qu'à l'époque où je m'arrêtais sous les ranchos, j'étais libre de mon temps, et je pouvais le consacrer tout entier au travail; tandis que, reçu chez des particuliers qui me traitaient de leur mieux, je me voyais forcé de leur sacrifier beaucoup d'instans ; et, dans la saison où l'on était alors, j'étais encore contrarié dans mes occupations par la brièveté des jours. Mon journal se

- Suivant l'auteur des Memorias historicas, v. VIII, p. 2da, p. 167 et 168, le village de Chapada ou S. Cruz de Chapada est situé à 3 1. nord du Fanado, par le 16° 48' lat.; la paroisse entière comprend 2,300 habitans; elle est bornée au nord par celle d'Agua Suja, au sud par celle de Villa do Bom Successo, à l'ouest par celle d'Itacambira. Selon les mathématiciens portugais cités par d'Eschwege (Bras. Neue Welt, II, p. 176), c'est par le 17° 6′ 37′′ qu'est situé Chapada.

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