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les pompes, venait de l'horreur du vide; on ne le croit plus. Le supplée toute la proposition; ce qui l'a fait nommer pronom suppléant.

Telle est la règle fixe; mais je ne sache pas qu'on l'ait encore appuyée d'un principe: le voici. Toutes les fois qu'il s'agit d'adjectif,, soit masculin ou féminin, singulier ou pluriel, ou d'une proposition résumée par ellipse, le est un pronom de tout genre et de tout nombre. S'il s'agit de substantifs, on y répond par le, la, les, suivant le genre et le nombre. Exemple: vous avez vu le prince, je le verrai aussi, je verrai lui; la princesse, je la verrai, je verrai elle; les ministres je les verrai, je verrai eux. On emploie ici les articles qui font alors la fonction de pronoms, et le deviennent en effet par la suppression des substautifs; car si l on répétait les substantifs, le, la, les, redeviendraient articles. Tout consiste donc dans la règle sur ces pronoms, à distinguer les substantifs, les adjectifs et les ellipses.

Des Grammairiens demandent pourquoi dans cette phrase: Je n'ai point vu la pièce nouvelle, mais je la verrai, ces deux la ne seraient pas de même nature ? C'est, répondrai-je, qu'ils n'en peuvent être. Le premier la est l'article, et le second un pronom, quoiqu'ils aient la même origine. Ce sont, à la vérité, deux homonymes, comme mur, murus, et múr, maturus, dont l'un est substantif et l'autre adjectif. Le matériel d'un mot ne décide pas de sa nature, et malgré la parité de son et d'orthographe, les deux la ne se ressemblent pas plus qu'un homme mûr et une muraille. A l'égard de l'origine, elle ne décide encore de rien. Maturitas venant de maturus, ne laisse pas d'en différer. C'est, dira-t-on peut-être ici, une dispute de mots : j'y consens; mais en fait de Grammaire et de philosophie, une question de mots est une question de choses.

CHAPITRE VIII.

Des Pronoms.

Comme les hommes ont été obligés de parler souvent des mêmes choses dans un même discours, et qu'il eût été importun de répéter toujours les mêmes noms, ils ont inventé certains mots pour tenir la place de ces noms, et que pour cette raison ils ont appelés pronoms.

Premièrement, ils ont reconnu qu'il était souvent inutile et de mauvaise grâce de se nommer soi-même; et ainsi ils ont introduit le pronom de la première personne, pour mettre au lieu du nom de celui qui parle : ego, moi, je.

Pour n'être pas aussi obligés de nommer celui à qui on parle, ils ont trouvé bon de le marquer par un mot qu'ils ont appelé pronom de la seconde personne : tu, toi, tu ou vous.

Et pour n'être pas obligés non plus de répéter les noms des autres personnes ou des autres choses dont on parle, ils ont inventé les pronoms de la troisième personne ille, illa, illud, il, elle, lui, etc. Et de ceuxci il y en a qui marquent comme au doigt la chose dont on parle, et qu'à cause de cela on nomme démonstratifs; comme hic, celui-ci, iste, celui-là, etc.

Il y en a aussi un qu'on nomme réciproque, c'est-àdire, qui rentre dans lui-même; qui est, sui, sibi, se, se: Pierre s'aime; Caton s'est tué.

Ces pronoms, faisant l'office des autres noms, en ont aussi les propriétés : comme,

LES NOMBRES singulier et pluriel: je, nous; tu, vous. Mais en français on se sert ordinairement du pluriel vous au lieu du singulier tu ou toi, lors même que l'on parle à une seule personne : vous êtes un homme de promesse.

LES GENRES: il, elle. Mais le pronom de la première personne est toujours commun; et celui de la seconde aussi, hors l'hébreu, et les langues qui l'im¡tent, où le

את est distingue du feminin אתא masculin

LES CAS: ego, me, je, me, moi. Et même nous avons déjà dit en passant, que les langues qui n'ont point de cas dans les noms, en ont souvent dans les pronoms.

C'est ce que nous voyons en la nôtre, où l'on peut considérer les pronoms selon trois usages que nous marquerons par cette table :

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Mais il y a quelques remarques à faire sur cette table.

La 1re est que, pour abréger, je n'ai mis nous et vous qu'une seule fois, quoiqu'ils se disent partout avant

les verbes, après les verbes, et en tous les cas. C'est pourquoi il n'y a aucune difficulté, dans le langage ordinaire, aux pronoms de la première et de la seconde personne, parce qu'on n'y emploie que nous,

vous.

La 2o est que ce que nous avons marqué, comme le datif et l'accusatif du pronom il, pour être mis avant les verbes, se met aussi après les verbes, quand ils sont à l'impératif : vous lui dites, dites-lui; vous leur dites, dites-leur; vous le menez, menez-le; vous la conduisez, conduisez-la. Mais me, te, se, ne se disent jamais qu'avant le verbe: vous me parlez, vous me menez. Et ainsi, quand le verbe est à l'impératif, il faut mettre moi au lieu de me : parlezmoi, menez-moi. C'est à quoi M. de Vaugelas semble n'avoir pas pris garde, puisque, cherchant la raison pourquoi on dit menez-l'y, et qu'on ne dit pas menez-m'y, il n'en a point trouvé d'autre que la cacophonie · au lieu qu'étant clair que moi ne se peut point apostropher, il faudrait, afin qu'on pût dire menezm'y, qu'on dît aussi menez-me; comme on peut dire menez-l'y, parce qu'on dit menez-le. Or, menez-me n'est pas français, et, par conséquent, menez-m'y ne l'est pas aussi.

La 3e remarque est que, quand les pronoms sont avant les verbes ou après les verbes à l'impératif, on ne met point au datif la particule : à vous me donnez, donnez-moi, et non pas donnez à moi, à moins que l'on n'en redouble le pronom, où l'on ajoute ordinairement même, qui ne se joint aux pronoms qu'en la troisième personne : dites-le-moi à moi; je vous le, donne à vous; il me le promet à moi-même; ditesleur à eux-mêmes; trompez-la elle-même; diteslui à elle-même.

La 4o est que dans le pronom il, le nominatif il ou

elle, et l'accusatif le ou la, se disent indifféremment de toutes sortes de choses; au lieu que le datif, l'ablatif, le génitif et le pronom son, sa, qui tient lieu du génitif, ne se doivent dire ordinairement que des per

sonnes.

Ainsi l'on dit fort bien d'une maison de campagne : elle est belle; je la rendrai belle; mais c'est mal parler que de dire : je lui ai ajouté un pavillon ; je ne puis vivre sans elle; c'est pour l'amour d'elle que je quitte souvent la ville; sa situation me plaît. Pour bien parler, il faut dire : j'y ai ajouté un pavillon; je ne puis vivre sans cela, ou sans le divertissement que j'y prends; elle est cause que je quitle souvent la ville; la situation m'en plaît.

Je sais bien que cette règle peut souffrir des exceptions. Car 1° les mots qui signifient, une multitude de personnes, comme église, peuple, compagnie, n'y sont point sujets.

2° Quand on anime les choses, et qu'on les regarde comme des personnes, par une figure qu'on appelle prosopopée, on peut y employer les termes qui conviennent aux personnes.

3° Les choses spirituelles, comme la volonté, la vertu, la vérité, peuvent souffrir les expressions personnelles, et je ne crois pas que ce fut mal parler que de dire l'amour de Dieu a ses mouvements, ses désirs, ses joies, aussi bien que l'amour du monde: j'aime uniquement la vérité, j'ai des ardeurs pour elle, que je ne puis exprimer.

4° L'usage a autorisé qu'on se serve du pronom son, en des choses tout-à-fait propres ou essentielles à celles dont on parle. Ainsi, l'on dit qu'une riviere est sortie de son lit; qu'un cheval a rompu sa bride, a mange son avoine, parce que l'on considère l'avoine comme une nourriture tout-à-fait propre au cheval; que cha

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