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est vrai que l'i nasal s'est introduit au Téâtre, mais il n'en est pas moins vicieus, puisqu'il n'est pas autorisé par le bon usage, auquel le Téâtre est obligé de se conformer, come la Chaire et le Bareau. On prononce assez généralement bien au Théâtre; mais il ne laisse pas de s'y trouver quelques prononciations vicieuses, que certains Acteurs tienent de leur Province, ou d'une mauvaise tradition. L'in négatif n'est jamais nasal, lorsqu'il est suivi d'une voyèle ; alors l'i est pur, et le n modifie la voyèle suivante. Exemple, inutile, inoui, inatendu, etc. Lorsque le son est nasal, comme dans inconstant, ingrat, etc., c'est un e nasal pour l'oreille, quoiqu'il soit écrit avec un i; ainsi on doit prononcer ainconstant, aingrat.

Si nous joignons nos quatre nasales aux 10 voyèles reconues par MM. de P.-R. il y en aura déja 14. Mais puisqu'ils distinguent trois e et deus o, pourquo n'admètroit-on pas deus a, l'un grave et l'autre aigu, come dans pâte, massa farinea, et påte, pes; et deus eu, come dans jeûne, jejunium, et jeune, juvenis? L'aigu et le grave difèrent par le son, indépendament de leur quantité. On doit encore faire à Pégard de le ouvert la même distinction du grave et de l'aigu, tels qu'ils sont dans tête et těte. Ainsi nous avons au moins 4 e diférens; e fermé dans bonté, e ouvert grave dans tête, caput, ouvert aigu dans těte, uber, e muet dans la dernière silabe de tombe. L'e muet n'est proprement que la voyèle eu sourde et afoiblie. J'en pourois conter un cinquième, qui est moyen entre l'é fermé et l'è ouvert bref. Tel est le second e de préfere, et le premier de succede; G mais n'étant pas aussi sensible que les autres e, il ne seroit pas généralement admis. Cependant il se rencontre assés souvent, et deviendra peut-être encore plus usité qu'il ne l'est. Je me permètrai ici une réflexion sur le penchant que nous avons à rendre notre langue mole, efféminée et monotone. Nous avons raison d'éviter la rudesse dans la prononciation, mais je croi que nous tombons trop dans le défaut oposé. Nous prononcions autrefois beaucoup plus de diftongues qu'aujourd'hui ; èles se prononçoient dans les tems des verbes, tels que j'avois, j'aurois, et dans plusieurs noms, tels que François,

Anglois, Polonois, au lieu que nous prononçons aujourd'hui j'avės, j'aurès, Françès, Anglès, Polonès. Cependant ces diftongues métoient de la force et de la variété dans la prononciation, et la sauvoient d'une espèce de monotonie qui vient en partie de notre multitude d'e muets.

La même négligence de prononciation fait que plusieurs e qui originairement étoient accentués, deviennent insensiblement ou muets, ou moyens. Plus un mot est manié, plus la prononciation en devient foible. On a dit autrefois Roine et non pas Reine, et de nos jours Charolois est devenu Charoles, harnois a fait harnès. Ce qu'on apèle parmi nous la société, et ce que les anciens n'auroient apelé que coterie, décide aujourd'hui de la langue et des mœurş. Dès qu'un mot est quelque tems en usage chez le peuple des gens du monde, la prononciation s'en amolit. Si nous étions dans une relation aussi habituèle d'afaires, de guère et de comerce avec les Suédois et les Danois qu'avec les Anglois, nous prononcerions bientôt Danes et Suedes, comme nous disons Anglès. Avant que Henri III. devint Roi de Pologne, on disoit les Polonois; mais ce nom ayant été fort répété dans la conversation, et dans ce tems-là, et depuis, à l'occasion des élections, la prononciation s'en est afoiblie. Cète nonchalance dans la prononciation, qui n'est pas incompatible avec l'impatience de s'exprimer, nous fait altérer jusqu'à la nature des mots, en les coupant de façon que le sens n'en est plus reconoissable. On dit, par exemple, aujourd'hui proverbialement, en dépit de lui et de ses dens, au lieu de ses aidans. Nous avons plus qu'on ne croit de ces mots racourcis ou altérés par l'usage.

Notre langue deviendra insensiblement plus propre pour la conversation que pour la Tribune, et la conversation done le ton à la Chaire, au Bareau et au Téâtre; au lieu que chez les Grecs et chez les Romains la Tribune ne s'y asservissoit pas. Une prononciation soutenue et une prosodie fixe et distincte doivent se conserver particulièrement chez des peuples qui sont obligés de traiter publiquement des matières intéressantes pour tous les Auditeurs, parce que, toutes choses égales d'ailleurs, un Orateur, dont la prononciation est ferme et variée, doit être entendu de plus loin qu'un autre qui n'auroit

pas les mêmes avantages dans sa langue, quoiqu'il parlat d'un ton aussi élevé. Ce seroit la matière d'un examen assez filosofique, que d'observer dans le fait et de montrer par des exemples combien le caractère, les mœurs et les intérêts d'un peuple influent sur sa langue.

Pour revenir à notre sujet, nous avons donc au moins 17

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Il faut remarquer que l'i, l'u et l'ou sont susceptibles de diférente quantité come toutes les autres voyèles, mais non pas de modification plus ou moins grave; ce qui pouroit les faire nomer petites voyèles par oposition aux grandes a, e ouvert, o, eu, qui, indépendament de la quantité, peuvent être aigues, graves et nasales. L'e muet est la cinquième petite voyèle.

CHAPITRE II.

Des Consonnes.

Si nous faisons touchant les consonnes ce que nous avons fait touchant les voyelles, et que nous considérions seulement les sons simples qui sont en usage dans les principales langues, nous trouverons qu'il n'y a que celles qui sont dans la table suivante, où ce qui a besoin d'explication est marqué par des chiffres qui renvoient à l'autre page.

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1. Avec un point appelé dagesch lene.

2. Leyse prononce, aussi maintenant comme on prononce l'f latine, quoiqu'autrefois il eût plus d'aspiration.

3. C'est aussi comme se prononce le pe des Hébreux, quand il est sans point, comme lorsqu'il finit les syllabes.

4. C'est la figure du digamma des Éoliens, qui était comme un double gamma, qu'on a renversé pour le distinguer de l'f capitale ; et ce digamma avait le son de l'v consonne.

5. Comme encore le beth, quand il finit les syllabes. 6. Prononcé toujours comme avant a, o, u, c'est-àdire, comme un k.

7. Prononcé toujours comme avant a, o, u.

8. ll, comme dans fille. Les Espagnols s'en servent au commencement des mots llamar, llorar; les Italiens le marquent par gl.

9. n, liquide, que les Espagnols marquent par un tiret sur l'ñ; et nous, comme les Italiens, par un gn. 10. Comme on le prononce maintenant, car autrefois on le prononçait comme dr.

11. Comme on le prononce en français dans chose, cher, chu, etc.

12. Aspirée, comme dans hauteur, honte; car dans les mots où elle n'est point aspirée, comme dans honneur, homme, ce n'est qu'un caractère, et non pas

un son.

13. Esprit âpre des Grecs, au lieu duquel ils se servaient autrefois de l'éta H, dont les Latins ont pris l'н.

14. Selon son vrai son, qui est une aspiration.

S'il y a quelques autres sons simples (comme pouvait être l'aspiration de l'aïn parmi les Hébreux), ils sont si difficiles à prononcer, qu'on peut bien ne [les pas compter entre les lettres qui entrent dans l'usage ordinaire des langues.

Pour toutes les autres qui se trouvent dans les alphabets hébreu, grec, latin, et des langues vulgaires,

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