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hommes qui pouvait le mieux en juger; ce jour est un de ceux qu'ils ont consacré aux larmes; Callimaque est un de ceux qui a le plus autorisé Rudbeck.

On lit, dans la LXX des Lettres persannes : un des hommes qui représente le mieux; et dans la CXXV Lettre : une des choses qui a le plus exercé ma curiosité.

Le P. Courayer a dit : Catharin lui-même, un de ceux qui a eu le plus de part aux décrets du Concile, etc. ; c'est un de ces faux raisonnements qui n'acquiert aucune autorité pour savoir été employé par des auteurs d'ailleurs respectables. Et Despréaux (1) : une des choses encore qui avilit autant le discours, c'est la bassesse des termes.

Malgré toute la peine que M. Restaut a prise pour justifier ces phrases et les précédentes, critiquées par l'auteur des Jugements (2), bien des puristes et d'habiles Grammairiens ne laissent pas de regarder ces locutions comme vicieuses et comme contraires à l'analogie. Ils prétendent que, dans toutes ces occasions, un, loin d'être distinctif, est toujours énumé ratif; que, s'exprimer de la sorte, c'est faire un nom ou un pronom pluriel, sujet de la troisième personne singulière d'un verbe ; e'est marier un adjectif ou un relatif singulier avec un substantif ou un antécédent pluriel. La distraction sans doute a fait commettre cette faute à des savants qui écrivent bien d'ailleurs, mais qui s'occupent plus des choses que des mots, dit le critique ainsi, au lieu de nous opiniâtrer à excuser <cette faute, au lieu de recourir au prétendu distinctif un, quand nous voulons distinguer une personne d'avec une autre personne, ou une chose d'avec une autre chose, prenons un autre tour; disons simplement: Ctésias est le premier qui ait exécuté, etc.; Hégésilochus fut celui qui travailla, etc.; la magie est le sujet sur lequel, etc.; l'érudition est l'objet le plus digne, etc.

Quand nous voulons au contraire confondre une personne avec d'autres personnes, ou une chose avec d'autres choses, disons: Ctésias est un des premiers qvi aient exécuté, etc.; Hégésilochus fut un de ceux qui travaillèrent, etc.; la magie

(1) Tr. du subl., chapitre XXXIV.

(2) Tome III, page 273.

est un des sujets sur lesquels, etc.; l'érudition est un des objets les plus dignes, etc.

Ne donnons point la torture à notre esprit, pour autoriser des expressions qui paraissent choquer trop sensiblement la Crammaire naturelle, et par conséquent le bons sens et la logique.

L'abbé Régnier (1) demande comment un peut être pris pour un terme indéfini, puisqu'il n'y a rien de moins indéfini et de plus déterminé que ce qui désigne l'unité. Dans la phrase alléguée (2) : un crime si horrible mérite la mort, on ne marque pas, dira-t-on, l'espèce de crime, et cela se pouvant dire de tout crime, un par conséquent, dans cet endroit, est indéfini. Mais l'article le, la, appelé défini, peut aussi être employé d'une manière vague et indéfinie; car, dans cette phrase: le crime mérite la mort, le est dans un sens aussi indéfini que un dans cette autre phrase: un crime mérite la mort; et quand on dit : un homme sage doit être maître de ses passions, on ne parle pas plus indefiniment que si l'on disait : l'homme sage doit être maître de ses passions. Mais ce qu'il y a encore de moins favorable dans l'exemple cité: un si grand crime mérite la mort, c'est que la particule si étant relative, il faut de toute nécessité que, pour dire un si grand crime, l'espèce de crime ait été désignée auparavant, et par conséquent un, dans cette phrase, ne peut être regardé comme article indéfini.

De plus, la langue latine, qui ne connaît point d'articles, se sert pourtant quelquefois d'unus, una, etc., dans une acception toute semblable à celle que l'on appelle ici article indéfini. La première scène de l'Andriène de Térence, où le père de Pamphile dit fortè unam aspicio adolescentulam, par hasard j'aperçois une jeunc fille, nous en fournit un exemple indubitable. Pourquoi la langue française regarderait-elle comme article, une expression que la langue latine ne regarde pas comme telle ? Les Italtens et les Espagnols, qui ne se servent guère moins de ces mots que nous, ne les regardent point comme articles: cependant les Espagnols emploient souvent (1) Page 154.

(1) Présente édition, pages 68 et 69.

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uno, una, au singulier, et disent unos hombres, unas mugeres, au pluriel, dans le même sens que nous disons des hommes, des femmes. Une autre raison qui semble encore exclure un, une, du rang des articles, c'est qu'en bien des phrases on serait presqu'aussi fondé à recevoir pour articles indéfinis tout, quelque, certain, plusieurs, puisque l'on dit, tout crime mérite la mort, comme l'on dit, un crime mérite la mort.

Que le mot un soit article ou non, dit le P. Buffier (1), au lieu d'en disputer inutilement, il suffit de dire qu'il est usité en manière d'article, etc.

M. l'abbé Girard (2) soutient que dans cette phrase, un homme d'esprit ne se laisse pas attraper deux fois, un a une valeur bien différente de celle de l'article; cependant cette expression, l'homme d'esprit, équivaut à celle-ci, un homme d'esprit, et forme le même sens. Le mot le, ainsi que le mot un, fait un extrait dans la totalité de l'espèce, en réduisant la dénomination à un individu par conséquent un et le expriment tous deux une espèce d'unité vague et purement ségrégative, qui prend indistinctement dans la totalité de l'espêce un individu comme exemple, pour présenter cette totalité par un des sujets qui la composent, et non pour exclure les autres.

:

Quand un exprime une unité certaine et calculative, qui présente une idée numérale, et fixe la dénomination à un sujet unique, avec exclusion de tous les autres, alors un est un nom de nombre; il n'est pas article, mais il peut être accompagné de l'article. Exemples: de ces deux réflexions, l'une est bonne, l'autre est mauvaise; de tous ces principes, les uns sont vrais, les autres ou quelques-uns sont faux; parmi ces maximes, les unes sont utiles et les autres pernicieuses.

Les latins ont dit au pluriel uni, unœ: ex unis geminas mihi conficiet nuptias; aderit una in unis ædibus. Et au singulier quis est is homo ? unus-ne amator (3)? quel est cet homme? est-ce un amoureux? Hic est unus servus violentissimus (4), c'est un esclave très violent; sicut unus patcr fami

(1) N° 345.

(2) Tome I, page 200.
(3) Téren., Andr., Eun.
(4) Plaut., Truc.

liâs (1), comme un père de famille; qui variare cupit rem prodigaliter unam (2); celui qui veut embellir un sujet, unam rem, en y faisant entrer du merveilleux.

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Les Grammairiens, dit M. Du Marsais, ont appelé articles, certains petits mots qui ne figurent rien de physique, qui sont identifiés avec ceux devant lesquels on les place, et qui les font prendre dans une acception particulière.

Les prénoms ou adjectifs prépositifs, indicatifs, démonstratifs et métaphysiques, qui marquent, non des qualités réelles des objets, mais seulement des points de vue de l'esprit, ou des faces différentes sous lesquelles l'esprit considère le même mot, sont tout, chaque, nul, aucun, quelque, certain (dans le sens de quidam), un, ce, cet, cette, ces, le, la, les, auxquels on peut joindre encore les pronoms de la troisième personne, is, hic, ille, iste, et les adjectifs possessifs tirés des pronoms personnels; tels sont mon, ma, mes, et les noms de nombre cardinal, un, deux, trois, etc.

Le, la, les sont des adjectifs, puisqu'ils modifient leur substantif, et qu'ils le font prendre dans une acception particuliére, individuelle et personnelle; ce sont des adjectifs, métaphysiques, puisqu'ils, marquent, non des qualités physiques, mais une simple vue particulière de l'esprit.

M. l'abbé d'Olivet met le, la, les au rang des pronoms : la vertu est aimable, aimez-la. Selon M. Du Marsais, le premier la est adjectif métaphysique, ou, comme on dit, article; il précède son substantif vertu, il personifie la vertu, il la fait regarder comme un individu métaphysique; mais le second la, qui est après aimez, rappelle la vertu, c'est pour cela qu'il est pronom et qu'il va tout seul; alors la vient de illam, elle, aimez-la, suppléez vertu, qui est sous-entendu ; par conséquent le, la les sont toujours adjectifs métaphysiques, ou, comme dit M. l'abbé d'Olivet, pronoms adjectifs, et partout de même nature.

Le, la, les sont articles simples; du, au, des, aux sont articles composés. M. l'abbé Girard assure qu'il ́a entendu dire aux paysans de la lisière du Bourbonnais et de l'Auvergne,

(1) Cic., Orator. 1.

(2) Horat. Art. poét.

voilà bien de les feuilles, c'est bien le cas de les chèvres › pour des feuilles, des chèvres. Le P. Buffier a remarqué qu'en Artois et en Picardie, où subsiste encore une partie du vieux français on dit de le mien, à le mien, pour du mien, au mien.

On lit dans Villehardouin, traduit par Vigenère, al temps Innocent III, au temps d'Innocent III; l'apostoile manda al prodome, le pape envoya au prud'homme; la fins d'el Conseil si fut tels, l'arrêté du Conseil fut ; Gervaise d'el Castel, Gervais du Castel.

Les Espagnols disent, lo bueno, le bien, de lo bueno, de le bien, a lo bueno, à le bien; pluriel, los buenos, les biens, a los buenos, de les biens, a los buenos, à les biens. La mano, la main, de la mano, de la main, a la mano, à la main; pluriel, las manos, les mains, de las manos, de les mains, a las manos, à les mains; el ojo, l'œil, d'el ojo, al ojo, los ojos, les yeux; el alma, l'âme, d'el alma, al alma, las almas, les âmes, se déclinent au pluriel comme les noms précédents.

M. l'abbé Antonini, dans sa Grammaire, qui n'est pas à · beauconp près ni aussi pratique, ni aussi raisonnée qu'il se l'imagine, dit que les Anglais n'ont point d'article ; et cepen-, dant the chez eux est article de tous les genres et de tous les nombres : the king, le roi; of the king, de le roi ; to the king, à le roi; the king, le roi ; o king, ô roi; from the king, de le roi. Pour le pluriel, on ajoute seulement s à king : the kinhs, les rois; of the kings, de les rois; to the kings, à les rois ; from the kings, de les rois; the queen, la reine; the queens, les, reines; the emperor, l'empereur; the emperors, les empereurs. NOTA. The man, l'homme; (the men, les hommes), the woman, la femme (the women, les femmes), changent a en e pour former leur pluriel, au lieu de prendre s, etc. Of, to et from sont trois prépositions qui, avec l'article the, servent à exprimer les mêmes rapports que le génitif, le datif et, l'ablatif des latins...

Selon M. Restaut (1), le génitif ou ablatif des articles partitifs se forme par la simple addition de la marque du génitif, qui est de.

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