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étant de ce dernier sexe; ce qui se fait par le moyen d'une idée accessoire, qui s'ajoute à l'idée principale du mot. Toutes les nations ont joint aux noms cette idée accessoire, et ont fait masculins ou féminins les substantifs, sans consulter ni logique ni physique. Ce que le premier trait d'imagination a peint sans examen, l'usage l'a confirmé sans délibération. Ainsi les uns voient un rapport au mâle, où les autrés le voient à la femelle. Les Allemands, par exemple, font soleil féminin, que les Français font masculin. Cette distribution faite par le cas fortuit du premier coup de pinceau, sans motif, ni plan, ni systême à cet égard, est cause qu'on ne saurait donner des règles générales et précises pour distinguer au seul aspect le genre d'un substantif. » (1)

« Ce que nous lisons dans les différents écrits de M. Du Marsais sur le genre, est au fond la même chose que ce que nous lisons dans la Minerve de Sanctius. Cet excellent livre, écrit en latin, enrichi des savantes notes de Scioppius et de Perizonius, fournit sur ce sujet un système préférable à celui de M. l'abbé Girard. Développons ce système d'après M. Du Marsais.

Pour moi, dit ce Grammairien philosophe, je ne trouve point cette idée accessoire de sexes, ni dans la valeur des noms des êtres inanimés, ni dans les termes abstraits, ni dans les noms des êtres spirituels........... Je crois qu'il n'y a de véritable genre que dans les noms des animaux, dont la conformation extérieure est différente, dont l'espèce est sensiblement divisée en deux classes, savoir: la classe des mâles et la classe des femelles alors, la valeur du mot excite dans l'esprit l'idée d'un individu de l'une ou de l'autre de ces classes, un coq, une poule, un cerf, une biche (2); alors, au seul aspect du substantif, on peut distinguer de quel genre il est. Comme le substantif et l'adjectif ne font ensemble que la chose même, on a donné communément à l'adjectif une terminaison qui, en conservant l'unité de l'espèce, fait connaître la diversité de la classe. Les adjectifs qui qualifient des individus mâles, ont une termi

(1) Tome 1, page 225.

(2) Biche désignerait mieux, ce semble, la femelle du bouc, et chèvre. la femelle du cerf.

naison appelée masculine du mot latin masculus, un beau eoq, un grand cerf; les adjectifs qui qualifient des individus femelles, ont une terminaison qu'on appelle féminine du mot latin femina, une belle poule, une grande biche.

Mais à l'égard des noms des êtres inanimés, comme maison, rivière; des êtres spirituels, comme ange, âme ; des êtres abstraits, comme substance, unité, divisibilité, etc., la valeur de ces mots-là n'excitant plus dans mon esprit l'idée de l'une ni de l'autre de ces classes que j'ai observées dans les ani→ maux, il n'y a plus d'idée accessoire qui me fasse regarder ces mots comme ayant un véritable genre.

«Les noms ne marquent pas ce que les choses sont en ellesmêmes, ils ne désignent que ce qu'elles nous paraissent. Or, comme le peuple croit que les taupes n'ont pas d'yeux, parce que leurs yeux, qui sont extrêmement petits, ne paraissent point, et qu'il faut des recherches pour les découvrir ; de même comme la conformation extérieure de certains animaux nous les représente sans distinction de mâle ou de femelle, le genre de leurs noms, aussi bien que celui des êtres inanimés, a dépendu du caprice de l'usage, et ce caprice n'est connu que par la terminaison du nom adjectif que l'on trouve consacrée à ces mots-là.

« Les différentes terminaisons des adjectifs étant déjà établies, pour les noms des animaux, à deux classes apparentes, il a été plus commode de se servir de l'une ou de l'autre de ces terminaisons, que d'en inventer une troisième ; et même on latin, et dans les autres langues où cette troisième termi→ naison est établie, il s'en faut bien qu'elle soit suivie exacte→ tement: ce n'est donc que par extension, par imitation, ou par abus, que l'on dit que les noms dont je parle sont, ou masculins, ou féminins. C'est ainsi que nous appelons rime féminine celle qui finit par un e muet, quoique le mot soit masculin, comme Alexandre, Philippe, homme, etc., ou quoique le mot n'ait point de genre, comme dire, entendre, etc.; et cette dénomination lui vient de ce que l'e muet est consacré à la terminaison des adjectifs féminins, bon, bonne, saint, sainte, pur, pure, etc.

« Il y a donc deux sortes de genres ou de classes dans les

noms: 1° le genre fondé sur la différence apparente que la nature a mise dans les animaux de différente espèce; 2o le genre fondé sur la destination arbitraire que l'usage a faite de l'une ou de l'autre déterminaison de l'adjectif, sans qu'il y ait dans la valeur du substantif, c'est-à-dire, dans l'idée de ce qu'il signifie, rien qui exige l'une des terminaisons de l'adjectif préférablement à l'autre. Dans les noms des animaux à figure distinctive, l'adjectif obéit, c'est-à-dire que ces noms→ là étant par eux-mêmes masculins ou féminins, l'adjectif prend la terminaison qui convient à l'un ou à l'autre genre dont est le substantif

<«< Dans les noms des êtres inanimés ou spirituels, l'adjectif donne le ton au substantif, c'est-à-dire que comme eux-mêmes, la dénomination de masculin ou de féminin que l'on donne alors au substantif, ne se tire que de la terminaison masculine ou féminine de l'adjectif, selon la destination arbitraire que l'usage en a faite, sans qu'il y ait aucun rapport au sexe dans la valeur dn mot, comme le prétend M. l'abbé Girard.

<< En effet, tant que subsiste une langue qui a des adjectifs à deux terminaisons, le genre des noms des animaux est tou jours le même, parce qu'il est fondé sur la nature. Tant que l'on parlera français, on dira un beau coq, une belle poule; on dira toujours un duc, une duchesse, le comte, la comtesse; mais on dira suivant le caprice de l'usage, le duché ou la duché, le comté ou la comté.

« M. l'abbé Girard, qui condamne avec tant de mépris le respectable P. Buffier à cette occasion, n'est-il pas obligé luimême de recourir à un caprice? et à quel caprice? à celui du premier trait que l'imagination a peint sans examen, sans consulter ni logique, ni physique, par le cas fortuit du premier coup de pinceau, sans motif ni plan, ni système à cet égard (1).

<< S'il n'y a ici ni logique, ni physique, ni motif, ni plan, il n'y a donc que le caprice: or, caprice pour caprice, il vaut autant s'en tenir à celui de l'usage.

« Le genre des noms dans les langues persanne, turque et anglaise se distingue, non pas comme dans la nôtre, par la

(1) Tome 1, page 225.

terminaison des noms ; mais par la différence des sexes; de sorte que les noms des choses inanimées n'ont point de genre, ou, si vous voulez, ils sont du genre neutre.

« Ce est souvent substantif; il vient de la dernière syllabe de hocce. Alors, quoi qu'en disent nos Grammairiens, ce est du genre nentre; car on ne peut pas dire qu'il soit masculin, ni qu'il soit féminin. Ce que vous dites est vrai, hocce, istud quod dicis, verum est. Ceci, cela sont aussi dec substantifs

neutres.

« Le mot épicène vient du grec éπíxowo;, communis, promiscuus. On appelle épscènes les noms qui, sous une même terminaison, ou masculine, ou féminine, se disent indifféremment du mâle ou de la femelle. >>

CHAPITRE VI.

Des Cas, et, par occasion, des Prépositions.

QUAND on dit de suite, et dans un certain ordre, tous les cas, ou toutes les terminaisons d'un nom, c'est ce qu'on appelle décliner: on commence par la première terminaison d'un nom, ensuite on descend, on décline, on va jusqu'à la dernière (1).

Nominativus seu rectus, cadens à suâ terminatione in alias, facit obliquos casus (2).

Les Grecs n'ont que cinq cas, nominatif, vocatif, génitif, datif, accusatif; mais la force de l'ablatif est souvent rendue par le génitif, et quelquefois par le datif. Ablativi formá Græci carent, non vi quæ genitivo et aliquando dativo refertur (3).

Selon Varron, les cas ont été inventés afin que celui qui

(1) Voyez dans l'Encyclopédie, les mots cas, déclinaison.

(2) Priscianus, livre V, De casu.

(3) Angeli Caninii Envespòs. Paris, 1578, page 87.

parle puisse faire connaître, ou qu'il appelle, ou qu'il donne, ou qu'il accuse. Sunt destinati casus, ut qui de altero diceret, distinguere posset, cùm vocaret, cùm daret, cùm accusaret (1).

DU NOMINATIF.

L'abbé Regnier (2) appelle le nominatif cas direct, parce que c'est directement de celui-là que tous les autres dépendent, et parce qu'il gouverne directement toute la construction du discours. Ainsi, lorsqu'avant ou après un verbe substantif, ou censé tel, il y a un nom ou pronom au nominatif, ce n'est pas un pur nominatif suppléant, régi et jamais régissant, comme le prétend le P. Buffier (3). Dans cette phrase, s'il n'est pas savant, il le sera, le n'est point régi par le verbe, comme ce Père se l'est imaginé; le exprime simplement l'attribut que le verbe substantif liera avec le sujet il; il sera le, c'est-à-dire, savant. Le nominatif régi est une chimère, il n'y en a point. Les faiseurs de Rudiments ont tort de dire que le verbe substantif régit le nominatif : le verbe substantif ne régit rien, il lie seulement l'attribut au sujet. M. l'abbé Vallart (4), qui est de ce nombre, a fait une lourde bévue en assignant le nominatif pour régime de certaines prépositions.

DU VOCATIF.

La définition du vocatif, donnée par Port-Royal, et copiée mot à mot par M. Restaut, ne paraît pas bien exacte, quand on l'examine de près avec ce que l'abbé Regnier a dit de ce cas (5). On peut fort bien nommer une personne ou une chose sans lui parler, sans s'adresser à elle, sans l'appeler; mais on ne peut pas appeler, apostropher une personne ou une chose sans la nommer, c'est-à-dire, sans la désigner, ou par un nom, ou par un pronom, ou par un équivalent exprimé ou sousentendu. Pour parler juste, il faudrait, ce me semble, définir le vocatif, un cas par lequel on appelle ou on apostrophe

(1) Livre I, De analogia.

(2) Page 146.

(3) N° 431.

(4) Page 388.

(5) Page 143, etc.

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