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On pourroit employer le caractère G, pour le son du G fort, en lui donnant pour dénomination dans l'alphabet, le son qu'il a dans la dernière syllabe de bague. On emprunteroit du grec le gamma I pour Γ le g foible, et sa dénomination dans l'alphabet seroit le son qu'il a dans gué, vadum, ou dans la seconde syllabe de baguette. Le caractère j, qu'on appelle j consonne, prendroit la dénomination qu'on donne vulgairement au g; de sorte que l'on écriroit gomme, Tuide, anje, et les autres mots pareils.

Je ne dois pas dissimuler que d'habiles Grammairiens, en admettant la différence sensible des différens sons du G et du Q, pensent qu'elle ne vient que des voyelles auxquelles ils s'unissent; ce que je ne crois pas. Mais si le sentiment de ces Grammairiens étoit adopté, on ne pourroit pas nier du moins qu'il ne fallût fixer un caractère pour le ch, donner au 8າ dans l'alphabet, la dénomination du gue, comme on le prononce dans figue, et à l'j consonne celle de je. Anje, sonje, etc.

3o. Nous avons trois sons mouillés; deux forts et un foible. Les deux forts sont le gn dans règne, le ill danspaille; le mouillé foible se trouve dans aïeul, païen, faïence, etc. C'est dans ces mots une véritable consonne quant au son, puisqu'il ne s'entend pas seul, et qu'il ne sert qu'à modifier la voyelle suivante par un mouillé foible.

Il est aisé d'observer que les enfans et ceux dont la prononciation est foible et lâche, disent païe pour paille, Versaïes pour Versailles ; ce qui est précisément substituer le mouillé foible au mouillé fort. Si l'on faisoit entendre l'i dans aïeul et dans païen, les mots seroient alors de trois syllabes physiques ; on entendroit a-i-eul, pa-i-en, au lieu

qu'on n'entend que a-ïeul, pa-ien; car on ne doit pas oublier que nous traitons ici des sons, quels quesoient les caractères qui les représentent.

Pour éviter toute équivoque, il faudroit introduire dans notre alphabet le lambda λ comme signe du mouillé fort. Exemple, pare, Versane, fine. Le mouillé foible seroit marqué par y, qui, par sa forme, n'est qu'un lambda a renversé y. Exemple, payen, ayeul, fayence. On n'abuseroit plus de y, tantôt pour un i, tantôt pour deux ii : on écriroit on i va, et non pas on y va; paiis, et encore mieux pé-is, et non pas pays; abéie, et non pas abaye.

On se serviroit du ñ des Espagnols pour le mouillé de règne, vigne, agneau, etc. qu'on écriroit rene, vine, añeau; comme les Espagnols en usent en écrivant Iñès España, qu'ils prononcent Ignès, Espagna. Ceux qui sont instruits de ces matières, savent qu'il est très-difficile de faire entendre par écrit ce qui concerne les sons d'une langue ; cela seroit très-facile de vive voix, pourvu qu'on trouvât une oreille juste et un esprit libre de préjugés. Au reste, ce ne sont ici que de simples vues " car il n'y auroit qu'une compagnie littéraire qui pût avoir l'autorité nécessaire pour fixer les caractères d'une langue; autorité qui seroit encore long-temps contrariée, mais qui feroit enfin la loi.

Nous avons donc trois consonnes de plus qu'on n'en marque dans les Grammaires; ce qui fait vingt-deux au lieu de dix-neuf.

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Les dix-sept voyelles et les vingt-deux consonnes font trente-neuf sons simples dans notre langue, et si l'on y joint celui de x, il y aura quarante sons; mais on doit observer que cette double consonne x n'est point un son simple; ce

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n'est qu'une abréviation de cs dans axe, de dans exil, de deux ss dans Auxerre, et qui s'emploie improprement pour s dans baux, maux etc. C'est un s fort dans six, un z dans sixième, et un c dur dans excellent : on s'en sert enfin d'une manière si vicieuse et si inconséquente, qu'il faudroit ou supprimer ce caractère, ou en fixer l'emploi.

L'y grec, dans notre orthographe actuelle, est un i simple, quand il fait un seul mot. Exemple : il y a. Il est un simple signe étymologique dans système. Il est ii double dans pays; c'est comme s'il y avoit pai-is, mais dans payer, royaume, moyen, etc., il est voyelle et consonne quant au son, c'est-à-dire un i qui s'unit à l'a, pour lui donner le son d'un é, et le second jambage est un mouillé foible; c'est comme s'il y avoit pai-ïer, moi-ïen. Il est pure consonne dans ayeul, payen, fayence, pour ceux qui emploient l'y au lieu de l'ï tréma, qui est aujourd'hui le seul en usage, pour ces sortes de mots qu'on écrit aïeul, païen, faïence, etc. L'y grec employé pour deux i, devroit, dans la typographie, être marqué de deux points y, dont le premier jambage est un i, et le second un mouillé foible.

L'ï tréma, qui est un mouillé foible dans aïeul et autres mots pareils, est voyelle dans Sinaï. Tous les Grammairiens ne conviendront peut-être pas de ce troisième son mouillé, parce qu'ils ne l'ont jamais vu écrit avec un caractère donné pour consonne; mais tous les philosophes le sentiront. Un son est tel son par sa nature, et le caractère qui le désigne est arbitraire.

On pourroit bien aussi ne pas reconnoître tous les sons que je propose; mais je doute fort qu'on en exige, et qu'il y en ait actuellement dans la langue plus que je n'en ai marqué. Il peut bien se trouver encore quelques sons mixtes, sensibles à une oreille délicate et exercée, mais ils ne sont ni assez fixés, ni assez déterminés pour être comptés. C'est pourquoi je ne fais point de subdivisions d'e muet plus ou moins forts , parce que, si l'on donnoit à un e muet plus de force qu'il n'en a ordinairement, il changeroit de nature en

devenant un eu, comme il est aisé de le remarquer dans les finales du chant. A l'égard de l'e muet qui répond au scheva des Hébreux, et qui se fait nécessairement sentir à l'oreille, quoiqu'il ne s'écrive pas, lorsqu'il y a plusieurs consonnes de suite qui se prononcent, il ne diffère des autres que par la rapidité avec laquelle il passe. Ce n'est pas comme la différence d'un son à un autre, c'est une différence de durée, telle que d'une double croche à une noire ou une blanche.

M. DUCLOS ne se borne plus à vouloir changer l'orthographe, il propose d'introduire de nouvelles lettres. On sentira facilement quelle confusion cette innovation bien inutile jetteroit dans la langue écrite. Un exemple de cette méthode suffira pour en donner une idée : Le réne de Carle Kint, sélébre par tant de bataxes, affoiblit l'Españe Terrière, et passa komme un sonje. Cette phrase présente l'introduction dans l'orthographe françoise du gamma et du lambda grecs, dun espagnol, et un nouvel emploi du k, duj, de l's et du c françois. Comment M. Duclos n'a-t-il pas remarqué que si cette méthode étoit suivie dans les écoles, il en résulteroit un bouleversement qui dénatureroit entièrement notre langage, et que les vains efforts que l'on feroit pour la faire adopter, donneroient encore plus de difficulté à l'enseignement de l'orthographe? On ne sauroit trop le répéter, l'usage et l'habitude sont les seuls régulateurs d'une langue, et les changemens ne doivent être proposés qu'avec beaucoup de circonspection, sur-tout quand cette langue est fixée.

M. Duclos pense qu'une compagnie littéraire pourroit avoir assez d'autorité pour fixer ainsi les caractères de la langue. Une grande erreur de la philosophie moderne a été de penser qu'il étoit facile de changer les anciennes habitudes des peuples. L'expérience a prouvé la fausseté de cette présomption. Si l'Académie françoise elle-même avoit voulu faire dans la langue écrite une révolution de ce genre, il est certain qu'elle eût échoué, et que la singularité des nouveaux signes n'eût servi qu'à jeter du ridicule sur son système.

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